THEATRE, DANSE, SPECTACLE,...
THEATRE |
Mademoiselle Julie
d'August Strindberg - mise en scène Frédéric Fisbach
Théâtre de l'Odéon 18 Mai 2012 > 24 Juin 2012
scénographie, lumière, costumes : Laurent P. Berger
création des costumes de Juliette Binoche et de Nicolas Bouchaud : Alber
Elbaz pour Lanvin
dramaturgie : Benoît Résillot
traduction : Terje Sinding
collaboration artistique : Raphaëlle Delaunay
coiffure et maquillage : Sylvie Cailler
avec Juliette Binoche, Nicolas Bouchaud, Bénédicte Cerutti & un chœur
composé d'amateurs locaux.
production Festival d’Avignon
coproduction Odéon-Théâtre de l’Europe, les Théâtres de la Ville de
Luxembourg, Théâtre Liberté de Toulon, Barbican London, La Comédie de Reims
Centre dramatique national, CDDB-Théâtre de Lorient Centre dramatique
national, France Télévisions, Compagnie Frédéric Fisbach
action financée par la Région Île-de-France
avec le soutien de la Maison Lanvin et le soutien spécial de SPAC-Shizuoka
Performing Arts Center
avec le soutien de l’Adami
créé le 8 juillet 2011 au Gymnase Aubanel, Festival d'Avignon, 65ème édition
Spectacle accessible aux déficients visuels.
L'Odéon vous offre le service de description simultanée diffusée par casque
ainsi qu'un programme en braille ou en gros caractères:
le mercredi 30 mai à 20h & le dimanche 3 juin à 15h / Théâtre de l'Odéon.
http://www.yanous.com/tribus/aveugles/aveugles111007.html
… Une situation qui pose le couvercle
sur le cercueil d'une génération.
August Strindberg
Pour réunir sur scène deux artistes tels que Juliette Binoche et Nicolas
Bouchaud, il fallait l'un des plus intenses et poignants affrontements du
répertoire. C'est à un duel atroce que nous fait assister l'auteur de La
Danse de mort, entre un valet trop bien doué, séduisant, ambitieux, et une
jeune femme trop sensible à la supériorité de sa propre position, qui se
sent comme captive au sommet d'une haute colonne et s'invente, pour passer
le temps, des jeux plus ou moins cruels où elle achève de dompter les
hommes. Tout semble se passer à la fois en l'espace de quelques heures
pendant une nuit d'été – et dans un temps qui échappe à toute mesure
objective, sorte de flux onirique du fond duquel remontent des souvenirs,
des images d'abord sans lien qui vont peu à peu nouer leurs filets comme
pour y prendre l'héroïne à leur piège. Au-dehors, la fête continue, en
l'absence de Monsieur le comte. Au-dedans, c'est d'abord le vin qui coule,
verre après verre, tandis que la tension monte entre la jeune maîtresse et
celui qu'elle trouble, et que leur conversation louvoyante, passant d'un
plan à l'autre, tâtonne entre le «vous» et le «tu»... Mais qu'est-ce donc
que le «dehors» et le «dedans» ? Ce qui lie et entrave les protagonistes
n'est-il pas d'abord à chercher en eux-mêmes ? Fisbach n'a pas oublié que
Strindberg lui-même disait de sa pièce qu'elle était «un combat entre
cerveaux», un hjärnonas kamp, écrit Régis Boyer, «qui ne se traduit pas
nécessairement par des crimes dans l'acception courante du terme, mais par
un lent assassinat psychique où, à partir de moyens psychologiques
(suggestions, insinuations perfides, introduction d'un doute funeste dans la
conscience de la victime visée, hypnose, hallucinations soigneusement
entretenues, et ainsi de suite), il s'agit d'amener à sa perte le sujet
d'exception dont la présence parmi nous est intolérable»... Il fallait
inventer pour ce «meurtre d’âme» (själamord) un espace qui rende sensible le
fait que la lutte entre ces deux êtres se situe d'abord en eux-mêmes, et
dans une histoire qui échappe à leurs prises. Fisbach s'est arrêté à une
solution radicale, s'affranchissant des conventions naturalistes du décor
dicté par Strindberg, de façon à moderniser les événements (ou plutôt à les
«intemporaliser») tout en concentrant notre attention sur les corps en
présence. Tout se joue donc, plus que jamais, dans le ballet mortel entre
Jean et Julie. Le premier est incarné par un acteur qui fut Lear, Danton, un
désopilant Ponce-Pilate ou l'impayable Petypon de La Dame de chez Maxim sous
la direction de Jean- François Sivadier ; la seconde, malgré une carrière au
cinéma qui a fait d'elle une étoile mondiale, n'a jamais perdu le goût de la
recherche, de la scène – en un mot, des rencontres. Et celle-ci est plus
qu'une promesse de bonheur.
à lire Mademoiselle Julie d'August Strindberg, trad. Terje Sinding, éd.
Circé, 2008. |
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Casimir et Caroline, pièce populaire
Manège hilarant et déchirant de Ödön von Horváth
du jeudi 10 au dimanche 13 mai 2012 • 20h30 et 15h30 le dimanche* •
Studio-théâtre d'Asnières
mise en scène • groupe ACM • Hélène François et Emilie Vandenameele.
Avec Alban Aumard, Bernard Bouillon, Eurydice El Etr, Pierre-Louis Gallo,
Jean-Louis Grinfeld, Vincent Marie, Lucrèce Carmignac, Lorraine de Sagazan
et Raphaël Almosni
BOISSON COMPRISE, servie lors du spectacle.
Réservation indispensable au 01 47 90 71 52 ou sur
communication@studio-asnieres.com
*représentation supplémentaire jeudi 10 mai à 15h30.
Studio-théâtre d'Asnières 3, rue Edmond Fantin 92600 Asnières sur Seine.
M° Gabriel Péri (Ligne 13) ou Asnières sur Seine (gare SNCF, 10 min depuis
Saint-Lazare)
LEXNEWS A VU POUR VOUS... Que cherche l’homme dans les plaisirs de la fête ? Est-ce la satisfaction
d’un besoin supérieur à lui qui le pousserait à s’unir au monde ou l’oubli
du quotidien et de la fin ultime dont il faudrait à tout prix se rendre
amnésique ?
Lorsque l’on découvre la pièce tragique d’Odon von Horváth mise en scène
brillamment par Hélène François et Emilie Vandenameele la réponse part de la
première hypothèse pour glisser progressivement vers le second argument.
L’amour peut-il alors subir les vicissitudes de la société ? Horvath semble
catégorique : « …l’amour jamais ne s’arrête » pour poursuivre immédiatement
« du moins tant que tu ne perds pas ton travail » : le ton est donné !
Casimir et Caroline s’aiment, mais cela a-t-il encore un sens dans ces
années 30 à Munich lors d’une fête de la bière ? La question semble
saugrenue et la réponse aller de soi : l’amour est bien plus fort que
l’adversité qui se déchaine (Tristan et Iseult) et même de la jalousie de
clans familiaux (Roméo et Juliette), comment pourrait-il alors être menacé
par les aléas d’une économie en crise ? Horváth va nous prouver tout au long
de cette pièce que cette réalité insidieuse s’infiltre dans tous nos
comportements, y compris amoureux. Caroline souhaite prendre l’ascenseur
social, comme nous dirions aujourd’hui, et les nombreuses métaphores «
célestes » de la pièce y invitent. C’est notamment la référence au Zeppelin,
fleuron indécent du capital de l’époque qui s’élève au-dessus des yeux
ébahis de la troupe avec une chute immédiate : l’un des comédiens relève
cruellement que lorsque l’on ressent la faim, cet engin dirigeable paraît
bien superflu. Le manège est également une autre ascension évoquée pour ce
qu’il offre de vertige et d’abandon de soi, mais une fois de plus la chute
est immédiate : Horváth nous dévoile crûment ses effets avec la nausée qu’il
suscite chez les différents personnages de la pièce qui finissent
explicitement la tête dans le bidet (il y en a trois sur la scène !). La
musique, les cris, la joie qui se transforme en pleurs et en doutes
émaillent progressivement cette fête et ce manège devient de plus en plus
cynique en raison du voile qui se lève sur ces âmes en déroutes, tournant
autour des vanités du monde. L’amour devrait être plus fort et il n’en est
rien ! Ce destin tragique est particulièrement bien souligné par le jeu
subtil d’Eurydice El-Etr qui se laisse emporter dans ce tourbillon qui broie
tout, même les plus belles illusions. Face à elle, Alban Aumard, interprète
un Casimir touchant par ses failles et sa spontanéité : le personnage est
balloté entre l’amour de sa vie et ses relations douteuses. La mise en scène
de ces jeunes metteurs en scène rend à merveille ce théâtre populaire (Volksstück)
développé par Horváth en opposition avec le national-socialisme menaçant de
son époque. Donnée dans le cadre du Prix Théâtre 13 pour les jeunes metteurs
en scène, nul doute que « Casimir et Caroline » aura une place de choix et
offrira un avenir plus radieux que l’univers sombre de Horváth à ses
réalisateurs et comédiens talentueux !
Philippe-Emmanuel Krautter |
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LES SEA-GIRLS
fêtent la fin du monde
Figurez-vous que je ne connaissais pas La Nouvelle Eve, petit cabaret
délicieusement kitsch de la rue Pierre Fontaine ! Et ce fut un grand plaisir
que cette double découverte : un très bel écrin accueillant de magnifiques
créatures ! Car elles sont magnifiques, les Sea Girls ! Et magnifiques à
leur façon... un peu déjantée, un peu décalée et surtout pleine d’humour !
Mais elles ne sont pas seulement magnifiques, elles sont aussi talentueuses
et polyvalentes et chantent, dansent, causent, grimacent et se dandinent à
gorge et cuisses déployées... C’est donc du cabaret, du théâtre, de la
chanson, de la magie, du cirque que nous proposent ces improbables
créatures. Elles savent (presque) tout faire, mais c’est toujours à la sauce
Sea Girls, pas sérieuse et enlevée !
Mais si elles savent tout faire, c’est avant tout un beau tour de chant bien
de chez nous qu’elles nous offrent (Jean-Max Rivière qui écrivit pour
Juliette Gréco, Brigitte Bardot, Serge Reggiani ; Gérard Bourgeois, Joël
Rocher, Maurice Pon, Henri Salvador, ainsi que des auteurs actuels qui
écrivent pour elles), tour de chant multicolore et hilarant qu’elles
interprètent avec brio – et interprètent à tous les sens du terme, tant au
niveau vocal qu’au niveau du jeu et de la mise en scène, car les drôlesses
sont aussi habiles de la glotte que du visage ou de la gambette !
Et que chantent-elles, ces belles sirènes ? Et bien, ces belles sirènes ne
fêtent rien de moins que la fin du monde ! Il est vrai que les nouvelles du
monde exhalent, en cette période troublée, un certain parfum de chaos qui
n’est pas sans évoquer la fin d’un monde... Mais avec les Sea Girls, la fin
du monde n’est plus effrayante et l’on en viendrait presque à la souhaiter !
Ceci dit, plus qu’une réelle fin, leur spectacle constitue davantage une
parenthèse enchantée : les costumes, les voix, les interprétations, la
gestuelle de ces très drôles de dames sont survitaminés et drôlissimes, le
meilleur rempart du moment contre la déprime ambiante et la grippe. On
pourrait mettre un petit bémol sur certains textes qui ne sont pas aussi
enlevés et piquants que les autres, mais ça ne gâche pas le plaisir et ça
permet de se reposer un peu les zygomatiques ! Bref, une soirée avec les Sea
Girls, c’est une vraie piqure de joie de vivre en concentré !
C’est coloré, c’est kitsch, c’est drôle, c’est joyeux, c’est à voir, ce sont
les Sea Girls !
Olivier Rinaldi
Un spectacle conçu et interprété par
Judith Rémy, Prunella Rivière, Élise Roche, Delphine Simon
Mise en scène Patrick Haudecoeur
Guitare Dan Panama ou Benoît Simon
Percussions Guillaume Lantonnet
Arrangements Fred Pallem
Arrangements vocaux Lucrèce Sassella
Costumes Carole Gérard
Décor Christel Lebfèvre
Création son Jean-François Thomelin
Création lumière Jean-Luc Chanonat
Du 17 Novembre 2011 au 24 Mars 2012, les jeudis, vendredis et samedis à 21h
à la Nouvelle Eve, 25 rue Fontaine, 75009 Paris (M° Blanche)
Réservation au 08.92.68.36.22 - www.les-seagirls.com
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LEXNEWS A VU POUR VOUS...
Les Petites
Fêlures, de Claude Bourgeyx.
Les Déchargeurs, du 16 août au 29 octobre 2011
Adaptation, mise en scène, costumes et interprétation : Yann Mercanton
Lumières : Sandra Romanelli
Musique additionnelle : David Doyon (guitare) et Andréa Esperti (trombone)
Les Déchargeurs, 3, rue des Déchargeurs, 75001 Paris
www.lesdechargeurs.fr
La littérature classique, c’est bien ! On a-do-re !
Mais la littérature contemporaine, c’est bien aussi ! Et lorsque l’on n’est
pas familier du théâtre contemporain – ça peut arriver à tout le monde – il
y a un lieu où l’on peut le découvrir, se familiariser avec lui et s’en
repaître : le théâtre des Déchargeurs. Ce lieu, si central et pourtant si
discret, est un creuset pour se frotter à la création contemporaine,
récente, actuelle et à venir... Il a d’ailleurs contribué à la notoriété
d’auteurs comme Fabrice Melquiot, Jean-Luc Lagarce, Howard Barker... mais
aussi Pierre Notte, Olivier Py...
Depuis deux saisons, les Déchargeurs ont ouvert une thématique - un "état
des lieux" de notre société - organisée en triptyque : les deux premiers
volets, « la famille » puis « l’héritage et les héritages », se sont
déroulés lors des deux saisons précédentes. La saison 2011/12 quant à elle,
sera consacrée à "l’individu", sous toutes ses formes – vaste programme !
Dans ce cadre-là, où il est donc question de l’individualité et des
multiples formes qu’elle peut prendre, la prestation de Yann Mercanton, avec
« Les petites fêlures » de Claude Bourgeyx, prend tout naturellement sa
place. On avait déjà pu apprécier le talent de Yann Mercanton dans ses «
Microfictions » de Régis Jauffret (notamment au festival des Francophonies
de Limoges), où il incarnait toute une pléiade de personnages plus ou moins
déjantés, névrosés, attachants, humains... Cette fois, c’est un seul
personnage que l’on va suivre, et le personnage en question, c’est un
adjudant retraité de l’armée. Personnage haut en couleurs – il s’est pris
pour Nijinski, ce qui lui a valu cette retraite plus précoce que prévu – il
se retrouve face à lui-même et pour combler le silence - ou le vide - il
parle. Il nous parle ! De ses souvenirs, de ses illusions, mais aussi de sa
perversité, de ses faiblesses et de ses renoncements, de ses petites envies
de tuer, de ses petites fêlures, donc, mais aussi des nôtres...
Le texte de Claude Bourgeyx est vif, percutant, incisif, sans concession.
Les scènes sont courtes et s’enchainent à un rythme effréné. Il fallait bien
l’énergie de Yann Mercanton pour mettre en scène et interpréter ce
personnage et en porter toutes les facettes, avec vigueur autant qu’avec
sensibilité. C’est chose faite. Et avec brio !
Olivier Rinaldi |
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Le théâtre en DVD avec les Editions
Montparnasse
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