Les Chroniques du Promeneur
gourmand...
LA MAISON DE LA
TRUFFE
Rue Marbeuf - Paris

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Plancher en chêne,
la salle est longue, élégante, un peu austère, joliment éclairée, elle
décline de façon moderne le gris souris, le gris perle, le gris taupe.
Je remarquerai la boutique plus tard, légèrement en retrait par
rapport à l’entrée, on épargne aux convives sa traversée. Délicate
intention devenue si rare. La table est suffisamment espacée des
autres pour qu’on s’y sente bien. La truffe, ce n’est pas le bistrot,
c’est une cérémonie, un plaisir, une messe un peu secrète. |

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En saveur, tout est
une question sur quelques centimètres carrés de mariage, d’alliance,
de résistance. La truffe et l’œuf, bien sûr, sont les larrons en foire
d’une fête paysanne sous le palais. La brouillade est délicieuse. Mais
il y a aussi des trouvailles comme ce caviar de truffe où le
champignon est présenté sous forme de minuscules œufs comme s’ils
avaient été pondus par un esturgeon sarladais. Il faut dire que c’est
Caviar Kaspia qui a repris la Maison de la Truffe et cette trouvaille
scelle ces noces. Ajoutons que ce n’est pas seulement amusant, mais
que ça se déguste, qu’on est tenté de l’étaler sur une tranche de
pain. |
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D’une forme rudimentaire, proche de la pomme de terre, bosselée,
terreuse, elle ne paye pas de mine cette luxueuse. Bien peu de mortels
ont connu cette joie de la déterrer sous un noisetier, ou sous un
chêne, dans une terre sèche, grâce à un cochon, un chien truffier, une
mouche — la Suillia Gigantea tachetée d’orange. Brillat-Savarin
dans sa Physiologie du goût la baptise le diamant noir de la
cuisine. Dumas prétend qu’on ne l’ évoque qu’en portant la main à son
chapeau. Et il est bien plus plaisant de suivre son cours à Carpentras
que celui des actions de Facebook à Wall Street. Certains la disent
insaisissable. Elle a un goût prononcé, prégnant, qui dure un petit
temps dans la bouche, unique, pas vraiment une épice, un goût bien à
elle boisée, ferreux, au bout du compte parfumé, savoureux, mais
mystérieux. La truffe, puisqu’il s’agit d’elle, a sa maison au cœur de
Paris place de la Madeleine depuis 1932. Elle essaima même puisqu’une
seconde maison s’établit il y a quatre ou cinq ans rue Marbeuf tout
près de l’avenue Montaigne qui regorge de crocodiles en forme de sacs
ou d’escarpins, de créatures de rêve et de touristes américains. Voilà
qui enchanta le promeneur gourmand qui devait se rendre au 14 rue
Marbeuf au cœur de l’hiver. |
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Pizza, risotto, tartare,
turbot, rien sur la carte n’échappe à la truffe, il y a même une
truffe burger, voilà que l’insaisissable devient omniprésente, voilà
de la suite dans les idées, voilà de la monomanie. Un astérisque en
forme de couronne surmonté d’un M genre Cigare du Pharaon
indique « Truffe saison », « Truffe noire », « truffe blanche » dont
on peut accompagner chaque plat. Pays de cocagne, jubilation de cette
carte qui promet l’abondance et fait tomber le rare champignon comme
une manne du ciel. La charmante maîtresse de maison nous conseille la
pizza à la truffe, mozzarella et roquette et nous optons pour des œufs
de poule en brouillade. Le vin est servi. Une bouteille Les Hauts de
Pez, Saint-Estèphe 2006, resserrée d’abord, au goût compact, airelle,
écorce, qui résistera pied à pied à la truffe. |

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Et puis aussi dans
ce lieu, il y a ce plaisir de petit chimiste que la cuisine
moléculaire a développé, il faut goûter aux huiles. Toutes. L’une a
tant de parfum, que Sa Majesté la truffe noire elle-même semble fade,
comme si l’huile, cette huile-là, c’était la quintessence. Une petite
goutte au bout d’une cuiller. C’est saisissant. Mieux que le papier
tournesol.
Au total une soirée heureuse, des
découvertes, la curiosité piquée. Il existe un menu du marché très
accessible. Il fait beau. C’est Paris, vous flânez avenue Montaigne,
vous déjeunez à la Maison de la truffe…
Andrea de Lauris
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Un dîner aux
chandelles
dans le restaurant « Le Jardin de Russie
» - Rome |
Dîner dans le fameux restaurant situé au cœur des jardins de l’Hôtel de
Russie est d’une certaine manière rétablir les anciens usages d’une
capitale prestigieuse, ceux qui prévalaient dans cette Rome du XIX°
siècle et qui accueillaient les hôtes les plus illustres dans un espace
d’exception et de beauté. Rien n’a changé dans l’esprit même si le
confort et l’esthétique ont su s’adapter aux goûts du jour… L’heureux
résident de l’hôtel n’a qu’à descendre de sa suite spacieuse pour
trouver place dans l’agréable salle du restaurant, mi-véranda, mi-jardin
elle-même tant les nombreuses fenêtres ouvrent au cœur de
l’impressionnant jardin dessiné par le célèbre urbaniste Giuseppe Valadier.
La beauté de l’aménagement de la salle répondant au goût
très sûr de la designer Olga Polizzi fait hésiter le
regard entre la blancheur des murs aux allures d’orangerie et les
touches de vert soulignant des masques antiques au centre des murs. Le
jardin est omniprésent et si vous avez la chance d’être installé à une
petite table donnant directement sur l’extérieur, c’est littéralement
sous les palmiers et les orangers que vous aurez l’impression de diner
alors que vous êtes en plein cœur de Rome. Très rapidement le service
chaleureux des lieux se met en branle. Vous êtes à Rome, avons-nous dit,
et on tient à le respecter.

Nazzareno Menghini Chef,
sommelier et nombreux serveurs vont être à votre écoute de manière
discrète et néanmoins chaleureuse pour prévenir et exaucer tous vos
souhaits. La carte est inspirée par le célèbre Chef italien Fulvio
Pierangelini, deux étoiles Michelin, et dans les cuisines œuvre le
talentueux Chef Nazzareno Menghini, deux hautes pointures pour un lieu
d’exception. Autant dire que c’est à un véritable feu d’artifice
culinaire auquel nous aurons droit.
Après une
coupe de champagne qui scintille sous les lumières et des amuse-bouche à
la truffe blanche, une salade de rougets et de calamars survient comme
une œuvre d’art où la saveur du poisson rivalise avec la préparation des
petits calamars. Le savoir-faire et la qualité des ingrédients font d’un
plat simple une ode à la saveur et à la déclinaison habile des goûts.
 
La même surprise attend le gastronome pourtant averti par
ce tour de force : des raviolis au fromage et au poivre pourraient
apparaître bien simples pour un tel lieu, il n’en est rien tant
l’association délicate du fromage fondant et de la pâte fraiche est
subtilement rehaussée par un poivre doux et élégant, une harmonie
rassérénante en ces temps de complications culinaires…
Le sommelier
redoutablement efficace dans ses choix nous a proposé un Il Bosco
Cortona Syrah qui accompagne à merveille ces palettes méditerranéennes
avec un vin de grande concentration, fruité et aux notes de poivre doux.
Nous sommes prêts pour la suite des agapes alors même que
les lanternes et les bougies du jardin en terrasse attirent nos regards
avec magie… Un risotto au safran décoré de crevettes et de pistaches
s’avère être un bel hommage à cette cuisine italienne mariant avec
bonheur tradition du nord et du sud.

Le safran
rehausse délicatement l’association des crevettes et de la pistache dans
une harmonie toujours discrète et délicate, un mot d’ordre décidément
pour ce repas !
Le loup de mer aux artichauts est une merveille, surtout
qu’en cet automne l’artichaut est à son meilleur à Rome. Doux et
fondant, il est un des classiques de la cuisine des Romains et l’on
comprend pourquoi, à la seule dégustation de ce légume qui fait pourtant
partie de la famille des chardons.
Les viandes sont également à l’honneur avec le
remarquable Chef Nazzareno Menghini qui sait tout aussi bien exhaler les
saveurs de côtelettes d’agneau avec de la chicorée que le cochon de lait
aux épices, le tout servi avec une purée de pommes de terre à l’olive
d’olive inoubliable !
 
Les gourmets gourmands se régaleront également avec les
desserts savoureux du Jardin de Russie : baba traditionnel au rhum,
fruits des bois et chantilly, un Montblanc plein d’humour décliné à
l’horizontal ou encore une petite tarte au chocolat fondant avec un
sorbet aux fruits de la passion…
Un expresso,
un dernier verre de vin avant une promenade dans le jardin de l’Hôtel de
Russie et le bonheur n’aura plus de secret après une telle soirée passée
au Jardin de Russie !
Interview
Fulvio Pierangelini |

LEXNEWS : «
Qui est Fulvio Pierangelini, l’un des chefs d’Italie le plus connu
internationalement ? »
Fulvio Pierangelini : « Je vais commencer par répondre à votre
question en vous précisant que je n'ai jamais aimé suivre les tendances
ou les modes. J'ai toujours, jusqu'à aujourd'hui, mené ma vie, ma
cuisine, mes désirs… J'ai toujours rêvé de cuisiner, je n'ai jamais
travaillé dans un restaurant ni dans un service de cuisine, mais j'ai
commencé à travailler à l'âge de 17 ans dans des hôtels. J'ai commencé
comme plagiste, puis moniteur de voile tout en faisant des études de
sciences politiques à Rome et à Genève. J’avais toujours rêvé d'être un
ambassadeur ! Et je dois vous avouer que l'idée que je me faisais de
cette fonction était celle d'un ambassadeur à Versailles avec de belles
réceptions… C'était bien évidemment une vision idéaliste assez éloignée
de la réalité et de toute manière je n'étais pas né dans une famille qui
permettait de réaliser ces rêves. De plus, on ne peut pas dire que
j'étais politiquement correct ! Parallèlement, le fait de cuisiner a été
un réel désir, et en même temps une nécessité, très tôt dès l'âge de 14
ans. » |
LEXNEWS : «
N'avez-vous pas d'une certaine manière réalisé votre rêve premier en
devenant ambassadeur de votre propre pays sur le plan culinaire ? »
Fulvio Pierangelini : « Malgré moi, je suis en effet devenu d'une
certaine manière ambassadeur de mon pays. Mais je dois vous avouer que
ma vie a changé depuis trois ans. Jusqu'à cette date, je cuisinais pour
moi, c'était ma vie, mon rêve, mon désir et mon plaisir, même si cela me
coûtait très cher, dans tous les sens du terme. Je ne voulais pas être
le représentant de la cuisine, avoir cette figure de porte-parole du
monde culinaire. Je ne souhaitais même pas
parler avec mes convives, le seul fait de les regarder avant, pendant et
après le repas me suffisait. Regarder leur sourire, leurs visages, la
transformation de leur attitude... Tout cela n'a pas besoin de mots ! Et
à partir de cette expérience, je suis en effet - peut-être devenu malgré
moi- le cuisiner italien le plus connu internationalement, mon
restaurant était en première place en Italie pendant plus de 15 ans…
pleins d'amis venaient me voir du monde entier… »

LEXNEWS : « Comment expliquer ce changement dans votre vie ? »
Fulvio Pierangelini : « J'ai décidé un jour de fermer mon
restaurant, et cela n'était pas dû à la crise puisque j'avais encore à
l'époque plus d'une quinzaine de jours de réservations à l'avance alors
même qu'il se trouvait au bord de la plage, dans un lieu isolé. Vous
savez je n'ai jamais fait d'études de marketing, et cette approche
commerciale ne m'a jamais intéressé. Je voulais seulement cuisiner. Si
cela n'avait pas été le cas, je n'aurais pas choisi un tel lieu aussi
isolé, sans aucun commerce, ni ville à proximité. Il n'y avait qu'une
route, la Via Aurelia, celle des anciens Romains, et la mer ! Je
voulais seulement cuisiner tout en regardant la mer avec le coucher du
soleil chaque soir... Et lorsque je n'ai plus trouvé ce bonheur, lorsque
je me suis rendu compte
que je
n'aimais plus la façon dont les gens parlaient de ma cuisine, à un
moment donné j'ai pris conscience que je n'avais pas les défenses
suffisantes pour me protéger de tout cela. On avait beau m'adorer, il
suffisait qu'un imbécile dise le contraire pour se distinguer et j'étais
déstabilisé !»
LEXNEWS : « A l'image d'un artiste - ce que vous êtes
dans la cuisine - vous avez eu l'impression d'être d'une certaine
manière étouffé par le succès ? »
Fulvio Pierangelini : « Oui, je pense que l'on peut dire cela et en
plus je ne croyais plus à la gastronomie. Pour moi la gastronomie était
finie, il n'y avait plus les clients, ni le personnel de la grande
époque, même si mon restaurant était quelque chose de très décalé par
rapport à ce à quoi je fais référence. Je n'ai jamais pratiqué dans mon restaurant un
service de palace, il y avait plutôt des plats « sauvages ». Pour moi,
un plat est plein d'énergie. Je n'aime pas l'idée de recettes, d'ajouter
ceci ou cela, mes plats les meilleurs ne figuraient même pas dans ma
carte ! C'était une partie de moi et si cela devenait une routine,
c'était la mort de cette création. Ma cuisine part souvent de trois
saveurs, à partir de produits les meilleurs, et si le résultat recherché
est la simplicité, il y a tout un parcours, un chemin pour y arriver qui
ne doit pas apparaître, au risque de faire compliqué, artificiel. C’est
un peu cela ma cuisine. »

LEXNEWS : « Plus qu’un ambassadeur, c'est le
véritable don de vous-même que vous pratiquez dans votre cuisine. »
Fulvio Pierangelini : « Absolument, très souvent, lorsque je
cuisine, je me dis : tiens, c'est moi ! Je crois même que l'on peut dire
que mon âme est dans l'assiette avec le respect qui est au cœur de tout
cela. Je n'avais pas besoin de goûter à ma cuisine, car tout était déjà
fait dans ma tête avant même de la pratiquer. Naturellement, dans
presque tous mes plats, il y avait un côté rassurant, une sorte de
rappel au souvenir, à ces plats de mémoire. J'ai toujours eu à cœur de
sublimer au maximum un produit, et ce sans artifices, ni tromperie. Vous
savez, le seul fait de couper un brocoli ou une tomate de telle ou telle
manière peut changer radicalement la saveur et le résultat de ces
produits. Qui plus est, je n'achetais pratiquement aucun produit puisque
je faisais produire presque tous les ingrédients pour moi. Pour les
poissons par exemple, mon fils allait directement les pêcher en face du
restaurant et selon qu'il me disait qu'il les avait attrapés à tel ou
tel endroit, je pouvais savoir d’avance les variations de saveur.
C'était cela pour moi la vraie cuisine, je tentais d'exprimer au maximum
ce que le produit pouvait offrir, sans artifices. Tout cela bien sûr
s'ajoutait à la technique et au savoir-faire d'une pratique de 40 ans de
cuisine. Je crois réellement que cette époque est révolue et qu'elle ne pourra pas revenir. Il y avait un
véritable génie des lieux, et toute une histoire qui est terminée… Nous étions douze dans le restaurant, mais
j'étais le seul à cuisiner, et si je ne pouvais pas être présent, je
fermais tout simplement l'établissement. Aujourd'hui, c'est une autre
époque.
Je ne suis
plus dans les cuisines et mes plats sont faits par d'autres. Je donne
aujourd'hui les produits avec les mêmes exigences que par le passé et,
après, je propose mes recettes et mon savoir-faire aux différentes
cuisines des hôtels du groupe, à Rome, à Florence, à Bruxelles… Mais,
bien entendu, je ne peux pas transmettre mes émotions et ma sensibilité.
»
LEXNEWS : « Vous ne pensez pas qu’à l’image des grands maîtres de la
Renaissance italienne qui avaient des ateliers et déléguaient la plupart
du temps une partie de leur création à des assistants, il vous est
possible de réaliser la même chose ? »
Fulvio Pierangelini : « J'étais à New York au Frick Museum, un musée
magnifique que j'ai adoré, et il y a là un tableau très bizarre de
Rembrandt, le Cavalier polonais. Rembrandt avait toujours besoin
de produire, car il avait toujours de grands besoins d'argent. Et ce
tableau est étrange, car si le paysage est plus ou moins réussi, par
contre il y a un cheval de toute beauté, quelque chose d’admirable.
Cette représentation donne vraiment l'impression d'une œuvre composée à
plusieurs avec un décalage flagrant quant à la réalisation de l'animal.
Je ne veux pas obligatoirement dire par là que le travail des élèves
soit toujours inférieur, bien au contraire, mais je pense qu'il faut
toujours une petite touche du maître. Je n'ai pas envie d’arriver à ces
décalages. Je n'ai vraiment pas envie de faire un cheval magnifique dans
un tableau moyen. C'est pour ces raisons que je ne cuisine plus. Mon
idée aujourd'hui est plutôt de pousser ces équipes à l'excellence, de
leur donner tous les moyens pour produire le meilleur résultat. »

LEXNEWS : « Nous sommes toujours dans cette idée de générosité qui
caractérise visiblement votre parcours. »
Fulvio Pierangelini : « Vous venez de prononcer un mot qui pour moi
est au cœur même de ma vie et de ma cuisine : la générosité. Pour moi,
en effet, la générosité est véritablement à la base de la cuisine. Si la
technique est bien évidemment au départ indispensable, il faut savoir
par la suite l'oublier, par contre la générosité, elle, ne doit jamais
disparaître.
Et pour reprendre notre exemple du Cavalier polonais, si un
« cheval » semble trop compliqué à réaliser, je ne le mets pas à la
carte ! Aujourd'hui, je suis un peu un conseiller, je leur donne tout de
ce que je sais et parfois même j'arrive à me détester pour cela… Je
n'aimais pas apprendre aux autres auparavant alors qu'aujourd'hui je
parle parfois beaucoup pour éviter toutes les distorsions qu'on évoquait
avec l'exemple du tableau de Rembrandt. Je n'hésite pas à leur dire : « Caressez vos tomates, prenez-les de telle manière… Ne les jetez pas
comme cela… ».
C'est peut-être un peu fou à dire, mais cela manifeste le
respect qui est au cœur de tout cela également, je pense que cette
démarche exprime bien les rapports qu'il y a entre la personne et la
matière. »
Le Jardin de Russie,
Via del Babuino 9
00187 Rome - Italy
Tel: +39 06 32 88 81
www.hotelderussie.it
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Diner un soir d’été à Bergame
sur la terrasse du restaurant Colleoni…
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Vous arrivez à la tombée de la nuit sur l’inénarrable
piazza Vecchia dans la cité haute de Bergame et vous êtes invité à
prendre place à l’une des belles tables de la terrasse du restaurant
Colleoni avec comme voisin l’antique palais de la « Ragione » que
nous venons de visiter. L’influence de Venise se fait ressentir dans les
détails des édifices et pour peu vous entendriez un gondolier vous
proposez ses services…
Est-ce cet air vénitien qui nous a fait choisir le menu
de la mer proposé par le propriétaire des lieux, Pierangelo Cornaro,
lui-même chef renommé et avocat pourtant réputé de la cuisine lombarde ?
Nous ne le serons pas mais après un apéritif savouré dans
cet espace unique avec un temps estival, nous découvrons les premières
agapes avec ravissement.
Nous sommes immédiatement étonnés car nous pensions
trouver une cuisine locale de qualité et nous sommes immédiatement en
présence de la cuisine du chef Pinato Odorico, une cuisine de haute
volée, rivalisant avec la beauté des lieux.


Les Amuse bouche de purée de lentille de Castelluccio
avec ses trippes de morues en surprendront plus d’un, nous les premiers,
et la salade légèrement grillée de turbot aux citrons confits relevés
d’un filet d’huile de noix vous assure immédiatement que c’est bien une
cuisine de haut niveau que vous avez trouvée tout en haut de cette
colline médiévale ! Il est fort probable que parvenu à cette étape de
votre repas, vous entendiez subitement une cloche assourdissante sur les
coups de 22 heures, la surprise passée, vous apprendrez que depuis des
temps immémoriaux, cette cloche de la grande tour qui est à quelques
mètres de vous sonne inexorablement les 100 coups afin de prévenir les
habitants que les portes de la cité vont fermer, à l’heure du
couvre-feu. |
Les portes ne ferment plus depuis longtemps mais
l’incroyable volée de cloches sidèrent toujours les touristes surpris de
cette agréable permanence du temps... Entretemps, une délicieuse crème de
fèves accompagne des écrevisses rouges de San Remo, un régal tant
l’association parvient à vous faire oublier le gong envoutant des cloches
qui ne terminent pas leurs envolées !

Après de délicieuses tagliolini aux œufs relevées par du crabe royal, une lotte préparée à la
catalana et légèrement parfumée à l’oignon de Tropea vous fait atteindre
des hauteurs gastronomiques propices à la géographie des lieux. Le
plaisir culinaire est atteint avec une cuisine fière et entière, pleine
de maturité et d’audaces. Vous n’oublierez pas de déguster la pâtisserie
inventive du chef Cerutti Matteo, suivie d’un vieux rhum dont les lieux
ont le secret, avant d’arpenter calmement les ruelles endormies de la
Cité haute, rasséréné par tant de découvertes...

COLLEONI &
DELL’ANGELO
Ristorante in Bergamo alta
Piazza Vecchia,7 – 24129 Bergamo
Tel. # 035-232596 Fax. # 035.231991
E mail: info@colleonidellangelo.com
www.colleonidellangelo.com
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Un repas en cinq actes…
au Don Carlos du Grand Hotel et de Milan ! |

On entre au « Don Carlos » comme par enchantement. A partir du grand salon
de l’hôtel, une petite porte discrète vous mène par un étroit couloir dans
un lieu incroyable. Deux petites salles se rejoignent en angle droit pour
former l’un des restaurants les plus mythiques de Milan. Tous les grands
noms de la culture, de la politique et de l’économie en ont fait leur lieu
de prédilection. La première impression est celle d’un lieu « cosy » où
rien ne vient heurter le murmure des boiseries sombres que seules
éclairent quelques appliques discrètes. Une incroyable collection de
gravures et de décors de scènes pour certaines originales vous rappellent
que la Scala est toute proche. Vous êtes accueillis avec chaleur et
délicatesse et vous êtes certains d’être dans un lieu familier. ous pouvez
pourtant très bien vous retrouver assis entre le Président de la
République Italien et Daniel Barenboïm, sans que cela ne surprenne qui que
ce soit, car, ici, la vedette œuvre derrière les fourneaux et il s’appelle
Angelo Gangemi, l’un des chefs les plus renommés d’Italie.
Quelques airs de Verdi vous rappellent que le célèbre musicien était un
résident permanent de la maison et que ces lieux enchanteurs ont nourri
son inspiration pour des œuvres passées à la postérité. Le chef est
italien, romain d’origine et milanais de cœur, il vous le rappelle avec un
trio de raviolis où l’amatriciana, le brocoli et les anchois se disputent
la prééminence du bon goût. Pour confirmer votre jugement et que
décidément le grand art peut même résider dans des pâtes, vous gouterez
aux tagliatelles maison mariées à des cèpes nappées d’une crème de basilic
de Prà, de tomates cerises et de buratta, un fromage des Pouilles à fondre
de plaisir ! Vous entendez entre quelques bouchées un air de La Traviata
et votre cœur se réchauffe aidé en cela par un vin rond et généreux, d’un
beau rouge rubis, un chaleureux Maim Costaripa, 2007.

L’acte suivant voit des poulpes rôtis avec une crème de pomme de terre,
olives noires et haricots verts prendre place pour une symphonie de
saveurs inoubliables, Angelo Gangemi est un enchanteur, nous en sommes
convaincus ! Est-ce parce que le chef sait que vous êtes français qu’il a
décidé de vous proposer un « Chateaubriand de veau », nul ne le saura !
Toujours est-il que ce plat accompagné d’une sauce au foie gras et au
petit pois est un morceau d’anthologie, digne de l’auteur des Mémoires
d’Outre-tombe…
La musique enchaîne ses airs d’opéra, l’humeur musicale est en accord
parfait avec la joie culinaire qui se dégage de ces compositions
merveilleuses.
Et c’est bien la saveur et la beauté des desserts présentés qui vous
feront oublier que votre appétit est pourtant rassasié. Un mille-feuille
de chocolat et de menthe semble si léger que vous osez gouter encore à une
tartelette de fruits rouges fondants, seuls les incorrigibles oseront
toucher à un strudel de pèches blanches, les autres seront « condamnés » à
venir le goûter à un autre repas !
Un déjeuner tendance au Restaurant Caruso…
Pour déjeuner tendance dans un des meilleurs hôtels de Milan et pour
prendre le baromètre de la ville en étant installé dans la véranda qui
donne sur la Via Manzoni à deux pas de la Scala, le Caruso vous enchantera
en restant toujours sur une tonalité d’opéra. La qualité de la cuisine se
décline dans des plats de saison où le risotto au safran est en première
position.
En cette année de 150ième anniversaire de l’indépendance italienne, un
gratin d’aubergine a été tout spécialement conçu comme emblème de
l’excellence de la cuisine italienne ! Le service est rapide tout en étant
élégant et discret. Pour le gourmant, le choix des desserts sera
l’occasion de rester encore quelques précieux instants à sa table… une
table qu’il faudra réserver avant un après-midi de shopping ou de musées !
Entretien avec Angelo Gangemi, chef du Don Carlos,
restaurant Grand Hotel et de Milan, 28/07/11

LEXNEWS : « Vous êtes né à Rome et vous avez également étudié la cuisine
en France. Dans quelle mesure ces éléments ont-ils marqué votre création
dans votre cuisine ? »
Angelo Gangemi : « Je suis originaire de Rome, ville dans laquelle j’ai
passé vingt ans de ma vie. J’ai travaillé dans deux hôtels 5 étoiles dans
cette ville, puis j’ai passé trois ans en France au Touquet ainsi qu’à
Paris pour finalement arriver ici à Milan… La cuisine romaine est pour moi
la base même de ma cuisine. Ma mère m’a donné tous les secrets de cette
cuisine romaine. Je fais profiter ici à nos hôtes cette expérience
initiale parallèlement à la cuisine milanaise que j’apprécie beaucoup et
qui est à la base de nombreuses recettes servies ici au Don Carlos. Mais
attention, je tiens à vous préciser quelque chose d’important pour moi :
il ne s’agit pas d’un mélange de cuisine d’inspiration romaine et
milanaise, ces deux cuisines sont très différentes et il ne peut être
question de les mélanger. En Italie, nous tenons beaucoup à la spécificité
des régions dans notre cuisine. Bien entendu, cela ne m’empêche pas de
faire des recettes inspirées de ces régions mais repensées et revisitées
selon ma propre inspiration culinaire. |
Je pense que pour faire une cuisine de qualité, même à niveau
international, il est très important de connaître la spécificité de ces
cuisines traditionnelles. Si vous prenez ici à Milan une recette bien
connue comme l’escalope qui porte le nom de la ville, il est très précieux
de savoir réussir ces plats à la base de la mémoire de nombreux italiens
qui viennent ici.
Il n’empêche que la cuisine romaine est pour moi au cœur même de ma
cuisine. La France m’a beaucoup appris surtout pour l’aspect de
l’organisation d’une équipe, soudée et qui doit savoir travailler
ensemble. Pour moi, il est très important que toute l’équipe s’implique
dans les recettes que nous élaborons. Ils doivent chacun goûter à ce que
nous faisons, le commenter, proposer un ingrédient en plus ou en moins.
Une fois cela réussi, le plat sera intégré dans le menu. Je travaille avec
mon second depuis plus de dix ans. Nous sommes au même diapason. »
Lexnews : « Vous êtes le chef d’un des meilleurs restaurants de Milan,
dans un hôtel où Verdi et de nombreuses célébrités ont demeuré, quelles
sont les influences de ces lieux dans votre cuisine ? »
 
Angelo Gangemi : “Nous sommes ici en effet dans un hôtel historique et la
cuisine traditionnelle a bien entendu une place très importante. Nous
réalisons beaucoup de menu à thème et nous insérons régulièrement des
appellations de plat faisant référence à des personnages célèbres qui ont
séjourné ici. Guiseppe Verdi vient bien entendu en premier puisque le nom
même du restaurant est un hommage direct à cet illustre compositeur. Nous
allons bientôt proposer un cappuccino Verdi dans cet esprit. Nous
réalisons également des plats qui font directement référence à l’histoire
de cet hôtel. Il est vrai que de nombreux personnages ici inspirent
directement ou indirectement des recettes et des créations que nous
réalisons tout au long de l’année. Comme vous avez pu le remarquer, notre
restaurant est très lié à la Scala avec toutes ces esquisses de décors
d’opéra directement accrochées au-dessus de la tête de nos convives. Tout
cela est en effet très présent dans ma cuisine. Les grands noms de la
saison lyrique nous font l’honneur de notre restaurant et notre Président
de la République est un habitué des lieux ! C’est en effet quelque chose
de très important pour moi… Cela ne m’éloigne cependant pas de ma priorité
absolue : le respect de l’identité de la cuisine que je propose. C’est
dans ce respect de la tradition que se situe le lien avec l’Histoire et la
culture. Parallèlement à cela, nous offrons bien entendu une cuisine qui
peut plaire à une clientèle internationale.»

Lexnews : « Qu’est ce qui caractérise votre cuisine et quelles sont les
priorités de votre cuisine ? »
Angelo Gangemi : “Je suis un partisan convaincu d’une cuisine qui respecte
la nature des saveurs des ingrédients. Pour moi, le produit est à la base
même de mes recettes, ce qui a longtemps été oublié dans les dernières
décennies de la haute gastronomie. Quand je déguste un poisson, je veux
pouvoir identifier ce poisson et reconnaître son goût. C’est pour cela que
vous ne devez pas ajouter trop d’ingrédients qui tuent ces saveurs
essentielles de départ. Je préfère acheter un excellent poisson un peu
plus cher mais qu’au moins vous reconnaissiez ce poisson. Pour moi, cinq
ingrédients sont suffisants pour accompagner un poisson ou une viande,
au-delà, on risque de dénaturer les choses. Certaines cuisines trop
sophistiquées sont en perte de vitesse alors même qu’elles étaient à la
mode il y a quelques années tout simplement parce qu’elles n’étaient pas
vraies ! Cela ne veut pas dire que je prône une cuisine facile… Quand un
nouveau cuisinier arrive dans mon équipe, je lui demande de me réaliser un
plat tout simple comme des spaghettis tomates basilic ! Je suis là et je
regarde : s’il réussit cela, pour moi il sera un bon cuisinier. C’est un
plat apparemment très simple et pourtant très difficile à bien réussir.
Bien entendu, nous partons de la cuisine traditionnelle pour proposer
quelque chose de plus sophistiquée qui corresponde à un restaurant d’un
hôtel cinq étoiles. Nous sommes bien entendu également influencés par la
cuisine française et espagnole.»
Lexnews : « Quelles sont vos priorités pour votre choix des ingrédients et
quelle est la place des saisons dans vos recettes ?”
Angelo Gangemi : “Nous recherchons bien évidemment les meilleurs
ingrédients, en donnant la priorité à l’origine italienne des produits
quand cela est possible, je suis un peu chauvin là-dessus, j’ai d’ailleurs
appris cela chez vous en France ! J’accorde également une grande
importance aux herbes, j’ai chez moi un petit jardin avec un grand choix
d’herbes. Cela me permet de tester nos plats avec des essais parfois
inédits d’herbes. Je viens de trouver une menthe particulière qui
ressemble à du chewing gum ! Mes clients étaient tellement surpris que
j’ai apporté la feuille à mes convives pour leur faire goûter crue…
J’accorde une grande importance aux saisons dans le choix des ingrédients.
Nous renouvelons la carte à 90% tous les mois, nous suivons donc de près
les saisons.
Vous constatez ainsi que la cuisine moléculaire n’a pas sa place ici, je
tiens à ma propre identité, il me semble que ma cuisine est arrivée à une
certaine maturité à laquelle je tiens.»
Ristorante Don Carlos
Grand Hotel et de Milan
Via Manzoni, 29
20121 Milano
tel. +39.02.72314640 |
Diner à la Villa Crespi...
...sur les rives du lac d'Orta
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Diner à la Villa Crespi...
Diner à la Villa Crespi, juste à la tombée de la nuit, appartient au
domaine de l’évanescence. Vous ne savez plus si l’on vous a subrepticement
transformé en Grand Meaulnes dans le roman d’Alain Fournier à l’approche
de la fête mystérieuse ou si vos pas vont rencontrer ceux de Shéhérazade
pour une ultime évocation. Le personnel vous semblerait presque en livrée
et c’est avec chaleur et grand style qu’ils guident vos pas vers un dédale
de salles toutes aussi belles les unes que les autres. Votre choix
s’arrêtera sur la salle verte, aux espaces majestueux, ou bien sur le
charme discret et élégant de la salle bleue profond rehaussée d’or,
soulignée par le cristal étincelant d’un lustre fier de ses effets, à
moins que vous ne choisissiez l’écrin chaleureux de la galerie mauresque
qui ouvre ses arcades vers le parc et vous transporte si loin à la cour
d’un grand sultan...
A partir de cet instant, l’enchantement opère une nouvelle fois, c’est
décidément une agréable manie en ces lieux !

Le chef Antonino Cannavacciulo anticipera tous vos rêves culinaires, même
ceux que vous ignoriez jusqu’alors. Sa cuisine inventive et d’une
fraicheur proportionnelle à la chaleur dégagée par l’homme va s’exprimer à
partir de variations incroyables qui flattent les papilles, sans jamais
les agresser, surprennent vos sens, sans jamais les trahir.
L’homme est un esthète des produits les plus fins et c’est avec génie
qu’il développe une harmonie délicate et sincère tout au long de la carte
inventive que l’on ouvre sous vos yeux. Vous pouvez vous laisser guider et
suivre « L’itinéraire du Sud au Nord de l’Italie », menu ou plutôt voyage
culinaire auquel le chef vous invite de sa Naples natale à sa région
d’adoption. Nous sommes ici dans le Piémont, et toute l’Italie vous ouvre
ses portes grâce à l’expérience de cette cuisine si attentive aux leçons
du passé et ouverte à la modernité avec sagesse. Vous pourrez
préférer suivre votre propre itinéraire, quoiqu’il en soit, la route ne
sera pas semée d’embuches.
Les brochettes de Saint Jacques et langoustine apparaissent sous un jour
nouveau lorsqu’elles sont marinées à la ciboule et au citron et qu’un
serveur vient à l’impromptu arroser d’une théière emplie d’une infusion de
pomme verte rehaussée de céleri… Des crevettes rouges et dans leur plus
simple appareil sont posées sur une crème de jaune d’œuf avec du caviar
pour couronner le tout ! Les convives sont charmés, la vaisselle scintille
autant que les regards et vous commencez à oublier tout ce qui est vain et
inutile.
Vous n’aurez jamais goûté à un tel gratin d’escargots aux herbes, lard et
crème anglaise à l’ail doux, ni même osé penser à une salade frisée
liquide avec de la langoustine si ce n’est dans une histoire de Lewis
Carroll ! Vous croyez rêver et vous êtes éveillé, à moins que ce ne soit
le contraire. L’ombrine présentée avec des dés de pommes de terre, du
choux fleur et de la tapenade vous fait goûter à cette simplicité pourtant
si difficile à réussir.
Si vous osez céder à la magie des fromages, c’est une véritable carte
d’Italie qui vous est présentée sur un chariot d’argent. Vous serez au
défi du choix et le temps de vous décider, on vous demandera délicatement
de patienter quelques minutes le temps de vous préparer tout spécialement
un pain brioché truffé de quelques pépites de chocolat pour accompagner
les morceaux que vous aurez choisis, comble du raffinement ! L’œil
ébahi n’attend plus que les desserts, quel gourmand ! On se demande
si la surprise est encore possible après un tel festival de saveurs. Les
surprises seront bien encore là lorsque vous aurez goûté à l’Espressionnisme
qui est une déclinaison de ce que le café peut offrir de meilleur
lorsqu’il n’est pas servi dans une tasse…

Le dessert au chocolat vous présentera quant à lui une incroyable sphère
d’or fourrée de crème qui attire tous les regards des voisins jaloux de ne
pas avoir fait ce choix. Ils n’auront qu’à revenir, c’est ce que nous
ferons une autre fois… pourvu qu’elle soit proche !
Il se fait tard, la sérénité a définitivement gagné votre cœur, vous
pourrez marcher quelques pas en direction du Sacro Monte, si cher à
Nietzsche, à moins que vous ne préféreriez profiter de la terrasse de la
villa illuminée la nuit, pour un dernier verre…
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Interview du Chef Antonino
Cannavacciulo, Villa Crespi, Orta, 27/07/11

Antonino Cannavacciulo et son épouse Cinzia
Lexnews : « De quelle région d’Italie
êtes-vous originaire et quelle a été l’influence pour cette cuisine servie
ici au Piémont ? »
Antonino Cannavacciulo : « Je suis né dans la campagne de Naples et
j’ai gardé de cette région un souci tout particulier pour la richesse et
la qualité de ses produits. Mais, j’ai surtout gardé précieusement avec
moi tout ce que cette Italie natale m’a laissé comme impressions
indescriptibles, et c'est ce que je tente chaque jour d’exprimer dans ma
cuisine, ici, dans ces lieux extraordinaires. C’est dans cet esprit que je
peux parfois transformer des produits de cette partie nord de l’Italie en
véritable festival méditerranéen grâce à cette inspiration qui est restée
gravée en moi.»
Lexnews : « Nous avons remarqué dans
votre cuisine un véritable respect des saveurs originelles, il n’y a pas
chez vous de complications inutiles.»
Antonino Cannavacciulo : “ La
cuisine qui paraît simple ne signifie pas pour autant facile. Aujourd’hui,
dans notre monde moderne, la simplicité est la chose la plus difficile à
réaliser. Si vous prenez l’ombrine que vous avez dégustée, elle peut
apparaître simple dans sa présentation, mais c’est un poisson très
exigeant pour pouvoir être préparé de la manière dont je la conçois. Il y
a ainsi beaucoup de travail dans le concept et dans la préparation de ces
plats."

Lexnews : « Quelle est l’influence
des lieux exceptionnels dans lesquels nous nous trouvons dans votre
cuisine ? »
Antonino Cannavacciulo :
“ Les lieux dans lesquels je pratique ma cuisine ont une très grande
importance. Si vous prenez une journée comme aujourd’hui où le soleil
succède à la pluie, ces effets de lumière et de senteurs ne peuvent rester
sans influences sur la façon dont je conçois ma cuisine. Ces variations
m’inspirent des plats avec des notes de champignon. Il est vrai qu’au
départ.

Ces lieux ont une très forte influence car
je les découvrais pour la première fois. Après quelques années, j’ai
appris à concilier ces influences avec ma propre créativité qui ne cesse
d’évoluer au fil des saisons et des années. Je me sens assez libre
aujourd’hui pour développer ma cuisine en utilisant le meilleur des
produits sans me sentir emprisonné par tel ou tel régionalisme. »
Lexnews : « Quelle est l’attente de
votre clientèle qui vient du monde entier ici ? »
Antonino Cannavacciulo :
“ La clientèle internationale vient ici pour découvrir une cuisine
italienne moderne avec une certaine identité des saveurs et nos hôtes
italiens recherchent un retour à la simplicité. En ces temps de crise
économique, les gens recherchent la sécurité, même dans la cuisine de haut
niveau. Nos clients recherchent quelque chose de très difficile à réunir.

C’est un peu comme la mode, nous avons des cycles. Aujourd’hui, les gens
n’ont plus faim et c’est plus difficile de faire manger des personnes qui
sont rassasiées par une multitude de saveurs offertes sur le marché.
Il nous faut retourner à l’essentiel et
notre art est de justement de raviver les papilles gustatives des
personnes qui viennent nous rendre visite.
Même si nous avons les lieux pour cela,
il faut noter que nous ne sommes pas dans une grande ville et malgré cela,
pour la soirée d’hier le restaurant était complet, c’est un signe que ce
message commence à être écouté !»
VILLA
CRESPI
Via G.Fava, 18 - 28016 Orta San Giulio (Novara)
Tel +39 0322 911902 - Fax +39 0322 911919
Mobile +39 334 6052912
info@villacrespi.it
www.villacrespi.it |
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Chronique du Promeneur Gourmand
Restaurant Maison Blanche
Avenue Montaigne
Quand un ami lointain débarque dans la capitale et qu’il a arpenté les
musées, la rue parisienne dont il a encore un peu de poussière sur les
semelles, je lui conseille de parcourir l’avenue Montaigne la nuit. Il me
regarde, incrédule, mais je persiste et lui confie combien je l’aime, que
c’est un lieu unique , que le promeneur y est somptueusement traité.
D’un côté il y a une contre allée plantée d’arbres qui vous met à l’abri
du flux des voitures, de l’autre, au lieu de l’habituel mur d’immeubles le
trottoir est bordé de petites grilles à hauteur d’homme s’ouvrant sur des
jardinets où poussent massifs de laurier, de buis, boulingrins, arbustes
dans des pots de terre cuite, une démarcation précieuse d’ébénisterie
donnant l’impression d’une antichambre de verdure avant d’accéder à la
véritable entrée. On se croirait chez des gens spécialement hospitaliers,
hobereaux sur les bords, délicats, qui savent combien une porte peut
impressionner et qui ont eu l’intuition d’accueillir avec tact le passant
en lui proposant cette halte champêtre. Et puis il y a les vitrines qui
restent éclairées toute la nuit. Chacune est un décor de théâtre qui
surgit d’un bosquet dont elle dore, cuivre ou argente le feuillage. Elles
sont habitées par des nymphes vêtues de tuniques à bijoux sonores, de
courtes robes de soie, de pantalons de groom, elles tiennent des sacs en
galuchat grenu, peau d’autruche ou cotte de mailles et sont chaussées
d’escarpins volés à Ali Baba. Mais surtout ces vitrines, devant la féerie
desquelles je m’arrête, renouvellent à chaque fois leur scénographie. Si
je veux retrouver cette divinité à ample veste de smoking qui, je sais
bien pourquoi, m’a envahi, phénomène de persistance rétinienne d’un rouge
à lèvres carmin, émotion qui m’a subjugué à cause de cette façon de tenir
son fume-cigarette, je dois revenir en arrière au plus vite, au risque de
rencontrer d’autres nymphes qui abondent dans ces parages et me
détourneraient par leurs enchantements. Le jour, ces vitrines, ces nymphes
sont accessibles, plus communes, elles perdent cette étoffe du rêve,
l’épanchement du songe dans la vie réelle, aussi préfère-je leur
commerce la nuit...
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Je conseillerai aussi à cet ami de prendre le petit
ascenseur au 15 rue Montaigne, dans le théâtre des Champs Elysées—superbe
façade à bas-reliefs en marbre blanc de Bourdelle— et d’atteindre le plus
haut niveau, autrefois grenier, comble, où Man Ray, Picabia et Satie se
livrèrent à un exercice dadaïste au profit du film de René Clair,
l’entracte, et maintenant sorte de pont suspendu au-dessus de Paris,
œuvre aérienne des architectes Brigit de Kosmi et de Jean Claude Grassio
en équilibre entre ciel la terre achevée en 1987. Une immense baie vitrée
comme l’œil d’un Gargantua futuriste, offre la rive gauche, coupole dorée
des Invalides, élégantes sœurs jumelles des clochers de Saint-Sulpice,
motif cubiste un peu raté de la tour Montparnasse, Paris et ses frasques
dans la paume de la main.
Mais je n’ai pas tout dit, je garde le meilleur pour la suite et l’on me
dira bien cachottier. Un homme de génie, — simplement un amateur de
musique affamé ou un gourmet au sortir de Désert d’Edgar Varèse—
regretta qu’après tant de joie, on n’ait rien à se mettre sous la dent.
Expression banale, bien humaine, certes, mais riche d’avenir, mots
pieusement recueillis, qui, semés, allaient pousser, fructifier jusqu’à
donner l’envie de créer un restaurant au dernier étage qui offrirait
Paris. La musique, la vue, les saveurs, plusieurs sens, que de muses ! En
2001 Maison blanche naît…
Il fallait donner un chef à ce restaurant, on en prit trois, étonnante
trinité. Silvain Ruffenach aux fourneaux, dans le sillage des cuisiniers
jumeaux d’une cuisine mythologique et étoilée : Jacques et Laurent Pourcel.
Maison blanche, on l’aura compris, est un lieu qui conjugue, assemble
influences, recherches, plaisirs. Il y a quelque chose de la Renaissance
italienne sur ce toit de Paris.
Passons donc à table.
J’hésitais entre « cuisses
de grenouilles à l’estragon tombé de baby épinard et champignon de Paris »
dont l’intitulé me fit songer au pays d’Auge, à des saveurs bien
françaises, populaires. Il fallait un certain culot pour revenir à la
grenouille qui à la fois a quasiment disparu des menus et évoque une
cuisine du terroir. Je pensais à ce surnom de frog qu’on nous attribuait
outre-Manche, à toute cette curiosité que cet animal de mare éveillait.
Dans mon assiette en train de me délecter devant un Paris nocturne !
J’optais plus classiquement presque à regret pour le « foie gras de canard
poché bouillon parfumé au poivre du Népal, wok de légumes et canard
croustillant ». Ce « presque à regret » d’ailleurs est inhérent à ces
fastueux instants où l’on parcourt le menu. Je me souviens d’une amie qui
me disait qu’une bonne carte fait de vous une « Marie qui louche ». C’est
chose faite. Mais je me consolais de ma métamorphose en buvant une gorgée
de ce vin rond, onctueux et vif à la fois, un Château de Moulin à vent
2009, qui se mariait si bien avec le fondant du foie chaud. Les petits
légumes craquants exhalaient le sous-bois sous la langue et le jus était
si délicieux, un peu japonais, que quitte à faire rougir Grimaud de la
Reynière de mon peu de bienséance, je n’en laissais pas une goutte dans
mon assiette. |
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Bruno Franck, Directeur Général |
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Sylvain Ruffenach, Chef de Cuisine |
De ma table disposée au bord de la
mezzanine comme une loge d’opéra sur la scène de Paris, m’intriguaient
deux hautes colonnes blanches qui flanquaient l’immense baie vitrée, dont
je ne savais si elles étaient un simple drapé de Madame Grès ou des
éléments porteur de l’architecture. On me servit des verrines entre les
plats dont la mode est ces jours-ci universelle et dont je dirai un jour
tout le mal, réduit que nous sommes assez souvent à cause de la dimension
du verre ou de la taille de la cuillère à être comme le renard de la fable
en compagnie de la cigogne :
On servit pour l’embarrasser
En un vase à long col, et d’étroite embouchure.
Le bec de la cigogne y pouvait bien passer
Mais le museau du sire était d’autre mesure,
Il lui fallut à jeun retourner au logis…
Ce qui ne m’arriva pas. On me servit un « ris de veau, morilles à la
crème, petits pois et oignons nouveaux à la Française » Les morilles et la
noix de veau était liées par une sauce blanche, fine qui n’étouffait
aucune de leurs subtilités. On navigue là en territoire gustatif délicat
où une pincée de sel en trop, une herbe, une épice trop forte peuvent
interrompre la fête. En contrepoint des petits pois frais craquants avec
des oignons nouveaux. Succulent.
L’Avenue Montaigne, une trinité de cuisiniers sorciers, une belle salle
qui offre Paris la nuit, une architecture heureuse, je cherchais dans mon
carnet de Promeneur gourmand s’il existait une autre adresse de ce genre…
Je cherche encore.
Andrea de Lauris
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Jacques et Laurent Pourcel |
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Restaurant Maison Blanche
15 avenue Montaigne, Paris 8ème
T. 01 47 23 55 99
www.maison-blanche.fr

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Restaurant Sette
Radisson Blue Hotel - Rome |
Restaurant Sapori
Hotel Lord Byron - Rome |
Restaurant Magnolia
Grand Hotel Via
Veneto - Rome |

Le restaurant Sette du Radisson Blue
Hotel vous fait gagner les hauteurs non seulement celles de la ville
avec une vue panoramique au 7ième étage mais également de la cuisine
italienne. L’esprit créatif du chef Alessandro Fabbri et du chef en second
Diego Corrao est à l’image du restaurant, à la fois moderne, mais avec une
touche classique, décontracté mais sans relâche excessive. Ce délicat
équilibre maintenu par un service irréprochable et professionnel vous
plonge immédiatement dans un cadre intimiste baigné par la lumière bleue
de la piscine tout proche, à quelques mètres de votre table. Les agapes
débutent par de fines pâtes vertes délicatement accompagnées de crabe et
de homard, de têtes d’asperges, de fines tomates et des fleurs de
courgettes…

Il faut également jeter
son dévolu sur un délicat consommé composé d’une crème de courgettes avec
de fines tranches de pain croustillant dorées avec du fromage. Le temps de
dévorer des yeux et du palais ce premier plat et d’avoir jeté un petit
regard circulaire sur les toits romains endormis en cette belle soirée et
un superbe tableau arrive dans votre assiette : un magnifique filet de
turbot est servi dans une cassolette de fruits de mer ! Est-ce une
réinterprétation de notre célèbre bouillabaisse ? Toujours est-il que
cette association est particulièrement inspirée, car elle procure au
convive le régal d’un vrai poisson servi avec une vraie soupe de poisson.
Les filets de sole panés et grillés avec des herbes et des graines de
sésame emporteront également le choix du gourmet romain. Ses tempuras de
courgettes ajoutent une note de couleur qui fait de ce tableau un plat
comblant de joie le convive rasséréné par cette belle cuisine. Quelques
douceurs romaines pour finir avec un millefeuille de meringue et une
mousse de chocolat avec son sorbet à la pomme ou bien un irrésistible
affogato de framboises accompagné de noisettes croustillantes.

Tout au
long du repas, le personnel avisé n’aura de cesse de vous conseiller sur
les vins à choisir : leurs avis s’avèrent juste et en diapason avec la
cuisine. Un excellent Cabernet, fruité et léger, a décidé d’accompagner
les plats, et un délicieux vin blanc sucré, spécialité de Sicile (Moscato
di Pantelleria), nous rejoindra en fin de repas afin de sublimer les
desserts ! Une Grappa bienvenue termine en beauté ce repas au Radisson Blue Hotel. Un petit tour autour de la piscine, un café servi avec des
mignardises que l’on regrettera de ne pas toucher et une belle nuit
sereine vous attend !

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Nous n’avons que quelques pas à faire parmi
les marbres, les belles consoles et autres objets de musée qui ornent
les murs avant de rejoindre la salle du restaurant Sapori à
l’intérieur de l’hôtel. Byron est décidément la figure
emblématique des lieux. L’auguste lord a tellement influencé ces lieux qu'il fallait un restaurant à l’image de cet écrin. Une fois arrivé, tout
est volupté : la décoration Art Déco de la salle réserve de belles
surprises aux amoureux des beaux objets. Le service sera également à la
hauteur des lieux : parfait ! Nicola Grieco, le sommelier, vous accueille
avec cette expérience des plus grands établissements. L’homme sait y faire
et vous recommande de se fier à lui, nous lui accordons immédiatement
notre confiance… Et elle ne sera pas trahie ! Le choix des vins est sûr et
il n’hésitera pas à vous faire part de sa difficulté à trouver un vin
blanc qui puisse s’accorder avec le délicat artichaut, une institution à
Rome… Ce sera un Serafini Vidotto, un Sauvignon blanc, qui
emportera ses suffrages ainsi que les nôtres.

La mise en bouche
préparée par le grand chef français Jean-Luc Fruneau nous avertit immédiatement : les saveurs déclinées avec les
meilleurs produits du terroir et de la saison font l’objet d’une recherche
à la fois inventive et en même temps dotée d’une certaine force, sûre
d’elle. Les petits artichauts dont on a subrepticement enlevé le cœur et
remplacé par une farce de pain et de fruits secs fondue au ragusano,
un délicieux fromage sicilien sont littéralement fondant de bonheur… Ce ne
sera que le début prometteur d’une longue série de découvertes culinaires
remarquables. Le maître des lieux sait marier le sucré et le salé sans
rupture possible. Un fondant de haricots borlotti et de crustacé est servi
avec une sauce iodée, la mer, on l’oublie trop souvent, n’est pas si loin
de Rome !
La soupe d’anchois
accompagne des raviolis de langoustines et d’artichauts pour une
association parfaite. Le festin se poursuit avec un risotto que nous
n’avions jamais rencontré jusqu’alors : châtaignes et homard faisant la
conversation avec de la marjolaine fraîche ! Si Byron avait été des nôtres
en cette soirée, il n’aurait pas renié la saveur et l’intelligence d’une
telle création… Comment oublier ce plat et être si infidèle avec les Paccheri (grosses pâtes cylindriques) aux fruits de mer accompagnés d’une
crème de carotte et poutargue ? Impossible de répondre et c’est là tout le
charme de la cuisine de Jean-Luc Fruneau. Le chef sait magnifier ces
produits frais au meilleur de leur expression. Et lorsque une lotte rôtie
arrive sur votre table avec une brandade de morue aux olives, câpres et
poires revêtue d’une sauce aux fèves sèches, nous abdiquons et rejoignons
les hauteurs célestes que les Antiques décrivaient déjà dans ces mêmes
lieux avec comme compagnon un superbe vin Anima Umbra Arnaldo Caprai
…
Une douceur romaine
achèvera ce tableau idyllique avec un délicat palet où l’amande et la
pistache tiennent compagnie avec de la crème de ricotta le tout servi avec
une poêlé de myrtille et de la glace pistache…
Il ne reste plus qu’à savourer un expresso bien serré comme seule
la ville de Rome sait en faire avant de faire quelque pas dans le quartier
résidentiel jouxtant le parc de la Villa Borghèse où les plus belles
maisons se disputent la position la plus élevée !
Une belle expérience hédoniste digne de notre
cher Lord Byron !
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Nous descendons de notre chambre en début de soirée vers le restaurant
Magnolia. Près du salon, nous sommes immédiatement accueillis et
installés dans une ambiance très urbaine. C’est un lieu apprécié des
Romains qui prennent souvent une pause dans ce quartier d’affaires réputé.
Le monde de la banque, des finances et de la politique aime à venir goûter
une cuisine à la fois légère et en même temps savoureuse, déclinant dans
les meilleures variations, toutes les possibilités offertes par les
produits de la mer.
Voici un lieu où la qualité du service rejoint l’excellence culinaire
pratiquée jour après jour. David, l’un des serveurs, parle un très bon
français et aura soin de vous conseiller parmi les nombreux plats proposés
par la carte particulièrement alléchante. Nous suivrons ainsi les
suggestions du jour avec un carpaccio de daurade délicieusement caché sous
une fine salade d’artichauts.

Une entrée en matière plaisante pour
aborder des Fettucine qui avaient accepté la compagnie de scampi et
de grosses crevettes. Un délicieux pinot noir Hofstatter Barthenau Alto
Adige vint fort à propos et apporta une touche de fraîcheur idéale à ces
variations de la mer. Un superbe turbot fit une entrée triomphale, il
avait pris comme parure du citron et des câpres dans un harmonieux
mélange, le tout adouci par une purée de pommes de terre pour une parfaire
association !

Nous sommes à Rome en Italie et les
douceurs de la ville exigeaient que l’on y fasse honneur… Une fantaisie de
desserts traditionnels italiens prit ainsi place sur une belle assiette :
une Torta Miro, un délicieux millefeuille de chocolat et de fraises ainsi
qu’un savoureux sorbet de fruits des bois vinrent clore un repas léger et
recherché.

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Radisson Blue Hotel,
Roma Via Filippo Turati, 171 - 00185, Rome, Italy
Tel. +39 06 444 841
Fax +39 06 44 34 13 96
www.radissonblu.com/eshotel-rome
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Hotel Lord Byron Rome
Italy | Via Giuseppe De Notaris, 5 - 00197
ROMA Tel. +39 06 3220 404
Fax +39 06 3220 405
www.lordbyronhotel.com
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Grand hotel via Veneto 5 Star Deluxe
via Veneto, n. 155 - 00187 Roma (Italy)
Tel. +39.06 48 78 81
Fax +39.06 48 78 87 88
www.ghvv.it
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un endroit mythique de Lisbonne
Le restaurant TAVARES
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La chronique du promeneur gourmand...
Le Tavares
Casa fundada em 1784 –Lisboa

Dans le quartier du Chiado, rue de la Miséricorde, à deux pas d’A
Brasileira hantée par l’ombre de Pessoa, une jeune femme oublie sa
pantoufle de vair dans un décor de conte de fées. Glaces immenses,
feuilles d’or à foison, lustres, appliques, on est ébloui par les
reflets, émerveillé par le rococo, la splendeur de cette salle du
restaurant Tavares. Elle date du règne de Marie la pieuse, dite aussi
Marie la folle, de cette réaction royale à la rigueur,
l’encyclopédisme du Marquis de Pombal. Or, faste de ce miroir, où la
noblesse se mire et le miracle est que le miroir est toujours là, tel
quel, qu’on vient y déjeuner, y dîner en complet, en robe ou plus
décontracté, et si l’on éteint son portable c’est qu’on a plaisir à se
livrer à cet « Il était une fois ».

Voilà le plus vieux restaurant de Lisbonne, voilà le plus beau, le
plus étrange qui ressemble à cette ville tant il mêle joie de vivre et
fantôme. On pense aussi à Cocteau, à La Belle et la bête. Jose
Avillez en est le jeune chef, il n’a pas plus de trente ans, il a rêvé
de l’endroit quelques mois avant de s’y retrouver. Il met en exergue
cette phrase exigeante d’Eça de Queiroz, le grand écrivain portugais
du dix-neuvième siècle qui vint souvent manger des huîtres au Tavares
: « Pour un homme, être perdant ou mis en échec dans la vie dépend non
de la réalité évidente à laquelle il est arrivé — mais de l’idéal
auquel il aspirait. » Mettons-nous donc à table et savourons en
amuse-bouche après un potage frais de châtaigne, fenouil et homard, un
clin d’œil moderniste à la cuisine moléculaire sous la forme de trois
olives délicieuses sur une bûche, dont une sphérique, remplie d’un air
comprimé se dilatant dans la bouche avec une profonde saveur d’olive
comme si vous mangiez l’olive sous l’olivier, ou comme si, cosmonaute
de la Nasa, vous faisiez une expérience d’avant-garde gustative.

C’est cette fantaisie dont est capable Jose Avillez qui
décline classiquement de légères palourdes à la portugaise et un œuf
cuit à basse température aux arômes de la terre. Techniques de
cuisson, ancrage dans la tradition, aventure et recherche. Il marie la
lecture des vieux livres de recettes, des bouquins de chimie, la
curiosité de l’explorateur portugais et les innovations dans les
façons de faire, les fours tournants mirobolants. Prenez son agneau de
lait à deux cuissons, ragoût de petits pois en purée, petits pois
sautés : l’agneau et les petits pois ont deux vies dans votre assiette
selon la manière de les préparer et il vous offre, cette variété de
saveurs en même temps. Et la morue, le bacalao, ce plat portugais
entre tous, si fameux qu’on finit par croire qu’on le pêche dans le
Tage, Jose Avillez rappelle avec justesse qu’on le pêche dans les mers
du Nord, qu’il traduit ce goût lusitanien du lointain. On le retrouve
évidemment à la carte : « Morue pochée dans de l’huile d’olive
accompagnée d’une purée de tomate et de « migas » croquantes, parfumée
aux feuilles de menthe du ruisseau et avec des figues de l’Algarve. »
Une délicieuse excursion géographique pour un promeneur gourmand.

Et le Tavares qui s’endormait dans ses beaux miroirs,
ses dorures, l’ombre de Marie la pieuse, dite Marie la folle se
réveille enfin, il a trouvé son prince charmant et la jeune femme a
plaisir à y oublier sa pantoufle de vair.
Andrea de Lauris

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Interview
de José Avillez, chef du Tavares |
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LEXNEWS : « quel a été
votre parcours, celui qui vous a amené à être un grand chef ? »
José Avillez : « Quand j'avais six
ans, je rêvais de devenir un charpentier ! On m'a répondu que je ne
gagnerai pas ma vie ainsi, qu'il me faudrait mieux devenir avocat ou
architecte. Comme j'aimais dessiner, je me suis dit alors que je
deviendrais architecte... Finalement, je me suis orienté vers des
études de marketing et de communication. Dans ce contexte, j'ai été
amené à réfléchir sur les rapports entre dégustation de vins et
cuisine. Il n'existait pas à l'époque de formation alliant ces deux
aspects. En travaillant sur la question, j'ai réalisé que j'avais
profondément envie de devenir un chef cuisinier. Je pensais qu'on me
dissuaderait d’aller dans cette voie ; or, bien au contraire, j’ai
plutôt reçu de nombreux encouragements. À cette époque, j'avais 20
ans. »
LEXNEWS : « Aviez-vous, avant d'aller dans
cette voie, l'habitude de cuisiner étant adolescent ? »
José Avillez : « Tout à fait !
Quand j'avais 10 ans, avec mes soeurs, nous avions fait tout un petit
business qui consistait à faire des gâteaux et à les vendre au
voisinage. Je cuisinais régulièrement pour ma famille, mes amis, etc.
C'est pour toutes ces raisons que je suis rentré un jour à la maison
et j'ai dit à ma mère : je vais devenir chef cuisinier. Elle m'a dit
que j'étais complètement fou, et je lui ai répondu que j’allais
terminer ma dernière année de marketing tout en réalisant une
formation dans le cadre de la cuisine avec des cours du soir. Le
premier mois de ma formation, j'ai appris avant tout que je ne
connaissais en fait rien du tout à la cuisine ! Après une formation
approfondie, j'ai ouvert mon premier restaurant à Cascais. J'ai eu un
parcours très rapide certainement aidé en cela par ma formation en
marketing. Dans la gestion de mon restaurant, dans le développement de
mes affaires, il est clair que tout cela a une grande importance. J'ai
eu également la chance d'avoir de précieux conseils de nombreuses
personnes compétentes en la matière. Je suis fermement convaincu que
nous récoltons ce que nous avons semé, et que nous sommes responsables
de ce que nous avons été.»

LEXNEWS : « Le restaurant Tavares est un lieu
mythique à Lisbonne. Comment en êtes-vous devenu le chef ? »
José Avillez : « Le propriétaire
m'a contacté, car le précédent chef devait quitter les lieux. Il faut
savoir que ce restaurant est l'un des plus anciens de Lisbonne
puisqu’il a aujourd’hui 226 ans. Les dernières années n’avaient pas
été une réussite, de nombreux chefs s’étaient succédé, il manquait une
continuité. On m’avait déconseillé de prendre cette nouvelle
responsabilité, car il y avait trop de défis à surmonter. J'ai tout de
même accepté la proposition !
LEXNEWS : « Connaissiez-vous ces lieux
auparavant et pensiez-vous un jour en devenir le chef ? »
José Avillez : « Oui, je
connaissais déjà les lieux auparavant, j'y étais venu quelques fois,
et bien entendu je rêvais d'en être le chef. Mais, c'était de l'ordre
du rêve ! Je dois vous avouer que deux semaines avant d'être contacté
par le propriétaire, j'ai fait un rêve très précis en ce sens… Le
restaurant a fermé pendant deux mois pour rénovation, et dès la
réouverture j'ai pu officier en tant que chef dans ce superbe lieu.
Dans les semaines qui ont suivi, la fréquentation a augmenté de 40 %.
Toutes les soirées étaient complètes ! Mais, il faut savoir que mon
activité ne se résume pas à la cuisine, il faut également penser à
cette cuisine, planifier tout ce qui a trait au marketing quant à
cette cuisine, penser à de nouvelles recettes... Ainsi, cette
profession est une véritable passion, mais également ma vie. J'estime
que je suis heureux de pouvoir gagner ma vie en faisant quelque chose
qui est en même temps un réel plaisir (...)"
Tavares
www.restaurantetavares.pt
Rua da
Misericórdia 35, Lisboa 1200-270
Téléphone:+351 213421112
|
(...)
LEXNEWS : « D'une certaine manière, vous
associez les deux caractéristiques de votre parcours à savoir la
création et le management. »
José Avillez : « Absolument ! Vous avez raison de souligner
cette part artistique qui était très présente lorsque j'étais enfant,
et qui joue encore un rôle déterminant dans ma cuisine aujourd'hui.
Par la cuisine, que j'ai pu également exprimer mes talents de
marketing et de management. Cela ne m'empêche pas d'aimer faire de la
cuisine traditionnelle ; en fait, qu'il s'agisse d'une haute cuisine,
ou d'un plat traditionnel, j'éprouve toujours un plaisir immense à
cuisiner. »
LEXNEWS : « Quelle est l'influence majeure
qui inspire votre cuisine ? »

José Avillez : « Je suis encore très jeune (30 ans) et mon
identité peut encore évoluer, mais, pour répondre à votre question,
j'estime que la cuisine portugaise est très fortement influencée par
la nature. Les paysages, la terre m'inspirent énormément dans la
création de nouvelles recettes. Je crois qu'il est très important de
constater qu'il y a encore 10 ans lorsque vous alliez dans les
principaux restaurants internationaux plus de 90 % d'entre eux
présentaient les mêmes cartes avec des plats très similaires. Cela
grâce à Dieu a commencé ces dernières années, et les chefs des grands
restaurants commencent à comprendre qu'il faut revenir aux racines
afin de ne pas être coupé de nos origines. Cela ne nous empêche pas
bien entendu de faire des recherches, ce que nous faisons
quotidiennement avec mon équipe en réfléchissant à de nouvelles
associations. Il ne faut pas oublier que l'un de nos plats les plus
traditionnels est composé d'un poisson, la morue, qui ne vient pas de
nos mers, mais de celle du nord ! C'est bien là le signe que nous
sommes des voyageurs mêmes dans notre cuisine… Je crois qu'il est très
important pour nous de comprendre et de garder à l'esprit cette
dimension historique et culturelle. Nous ne sommes pas pour autant
emprisonnés dans la tradition, même si cet après-midi encore,
j'étudiais des livres anciens de recettes portugaises. Il est évident
que nous ne souhaitons plus faire cuire aussi longtemps certains
coquillages ou poissons au risque de dénaturer la richesse des goûts
et des saveurs qu'ont ces éléments. Il nous faut faire la part des
choses et ne retenir que le meilleur ! Vous savez les Romains avaient
l'habitude d'associer les huîtres et le foie gras, et je suis sûr qu'à
cette époque ses huîtres et le foie gras avaient très certainement un
autre goût que celui qu'ils peuvent avoir aujourd'hui. Qui plus est,
les goûts des consommateurs ont eux-mêmes profondément changé.
Certaines associations peuvent paraître bonnes ou d'autres sont
mauvaises, et cela y compris dans une dimension historique. D’autre
part, dans notre restaurant nous cuisinons à la fois pour les
Portugais, mais également pour nos hôtes étrangers (65%). Cela
complique les choses même si bien entendu ces personnes viennent
goûter la cuisine traditionnelle lors de leur séjour au Portugal.
C'est un challenge tous les jours que de satisfaire la curiosité de
Japonais, d'Australiens, d'Américains avec notre cuisine. Nous
renouvelons régulièrement notre carte sans pour autant rester
prisonniers des recettes liées aux saisons. Certains plats sont
particulièrement demandés depuis que je suis chef ici. Il n'est
évidemment pas question de décevoir notre clientèle en les faisant
disparaître de la carte. En fait, l'une des choses les plus
importantes, outre la qualité de notre cuisine, c'est l’écoute de nos
clients. Nous attachons une très grande importance à leurs impressions
et réactions quant à ce que nous leur proposons. Pour cela, je viens
parfois dans la salle et je parle avec nos clients ; nous avons
d’ailleurs mis en place des cartes qui sont remises à la fin du repas
pour laisser leur impression.»
LEXNEWS : « Vous êtes d'une certaine manière
l'ambassadeur de votre patrimoine
culinaire. »
José Avillez : « Nous pensons en effet que Tavares peut
être l'ambassadeur de la cuisine contemporaine portugaise. Nous tenons
à ce que les plats traditionnels de la cuisine portugaise soient
présents dans la carte tout en offrant des interprétations libres à
partir de cette tradition. Mais, vous savez notre clientèle portugaise
préfèrent souvent les choses simples ! Il faut savoir que la plupart
de nos clients viennent ici pour fêter un grand événement et je suis
fier de pouvoir être associé à cela. Il faut se souvenir aussi que les
principaux courants poétiques et littéraires se sont réunis dans ces
murs prestigieux. Tout cela exige beaucoup de moi et de mon équipe,
mais pour rien au monde je ne changerai cela. Je crois que Tavares est
un lieu qui est non seulement un lieu de mémoire, mais également une
adresse représentative de la haute cuisine portugaise, un lieu où les
gens aiment se réunir. »

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L'excellence du Restaurant 100 Maneiras
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Une belle soirée d’automne à la Casa da Comida…
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Restaurante 100 Maneiras
Rua do Teixeira, 35, Bairro Alto 1200-459 Lisboa Reservas: 910.307.575
www.restaurante100maneiras.com
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Dans le Bairro Alto, après avoir gravi la côte qui nous mène sur
l'admirable belvédère Sao Pedro de Alcantara, il existe au 35 de la Rua do
Texeira, un restaurant qui joue sur les mots, mais pas sur la cuisine !
Nous entrons dans un restaurant intimiste où les boiseries peintes dans un
doux blanc crème reflètent une lumière tamisée annonciatrice des meilleurs
augures.
Ce cadre chaleureux accueille la cuisine d'un des plus talentueux chefs de
Lisbonne, Ljubomir Stanisic, d'origine yougoslave et valeur reconnue des
Lisboètes à la recherche d'une cuisine inventive et pleine de ressources.
L'accueil est immédiatement spontané, sans affectation, mais avec
professionnalisme. Le service suit de près les besoins des clients sans
accaparer leur attention. Les réjouissances gustatives ne vont pas tarder
à satisfaire la curiosité des convives. Le concept de 100 Maneiras est de
composer un programme culinaire avec avant-propos, introduction, chapitre
et conclusion. Ce livre ouvert voit défiler une à une ses pages culinaires
à un rythme ni trop rapide, ni trop lent, suivant lequel va se développer
des thématiques surprenantes, mais jamais choquantes. Et là, réside le
secret du grand chef Stanisic : pousser l'audace jusqu'aux limites de la
créativité sans rompre l'équilibre fragile de ce que le palais peut
accepter.
La séduction opère sans réserve. Qu'il s'agisse des fines lanières de
morue séchée étendues avec de mini pinces à linge sur un séchoir composé
d’un fil de fer tendu sur un demi-cylindre, ou de la soupe de melon en
terrine accompagnée d'un bonbon de foie gras associé à du chocolat posé
sur une petite cuillère...
L'appétit est aiguisé et est prêt à attendre la suite de la lecture de cet
essai des plus réussis. Un tartare de saumon vient à point nommé et il
n'est pas seul ! Il est accompagné d'une crème de fleurs de sureau, d'un
pesto de sésame avec de l'ananas. Le plat suivant est une surprise pour
les yeux autant que pour les papilles gustatives : des clams d'un beau
jaune reposent sur un nid de vermicelles noirs colorés par l'encre de
seiche et rehaussés par la couleur rouge du chili déshydraté, une
véritable réussite !
Nous poursuivons notre découverte avec un excellent turbot rôti à souhait
entouré de chips de manioc, de pommes de terre, des tomates et des olives
afin de nous rappeler que nous sommes au Portugal et que la ville se plaît
à se refléter dans l'eau. Une petite pause avec un trou normand lisboète
qui prend les couleurs d'un peu de champagne dans lequel une bille de
sorbet au basilic affûte l'appétit pour la suite du programme, une idée
originale...
Mais, nous laissons le lecteur découvrir la suite, car raconter tout ce
livre culinaire dénaturerait la curiosité indissociable de cette cuisine
inventive. Notons que le sommelier est redoutable pour amener avec
diplomatie (une main de fer dans un gant de velours) à la conclusion selon
laquelle vous gagneriez à découvrir les vins du Portugal en dînant à
Lisbonne... Et il a raison ! Ces choix sûrs suggérés avec
professionnalisme et discrétion ajoutent à la cuisine et au service
remarquable une note de bon goût avec un magnifique Monte Cascas, un vin
blanc du Doc Douro, cuvée 2009 à la robe couleur citron avec une texture
crémeuse et un équilibre remarquable pour un vin aussi jeune.
Il faut découvrir cette table au coeur même de la ville historique de
Lisbonne et la faire partager au plus grand nombre dans le même esprit de
générosité qui anime ce jeune chef et son équipe dynamique !
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Le restaurant Casa da Comida se découvre au nord de Lisbonne, près d'une
merveilleuse place portant le nom de Amoreiras où l’Aqueduto construit
dans la première moitié du XVIIIe siècle sur les ordres de Dom Joao V
étend puissamment ses arches. Le soir, alors que la douceur de cette fin
d'octobre ne cesse d'étonner le visiteur habitué à la fraîcheur de
l'automne hexagonal, c'est un régal que de se préparer à retrouver un haut
lieu de la cuisine de Lisbonne. C'est là où officie le talentueux chef
Bertillo Gomez, dans un cadre agréable et raffiné, disposé tout autour
d'un patio inspirant où trône un magnifique palmier au pied duquel il est
possible de dîner à la belle saison...
La décoration est soignée avec de belles vitrines abritant de la vaisselle
d'Asie, les murs d'un vert délicat donnent un caractère à la fois
intimiste et raffiné à ce lieu où on l'on vous accueille agréablement. Si
vous le souhaitez, vous prenez place dans l'un des confortables fauteuils
des petits salons qui entourent la salle, afin de prendre un verre et
manger quelques amuse-bouches pour découvrir la carte du menu,
tranquillement faire votre choix et de passer à table que lorsque tout est
prêt !
Différentes formules sont à la disposition du convive : un menu tradition,
un menu dégustation ou, bien sûr, une carte particulièrement bien fournie
où va se développer toute la créativité du maître des lieux. Parmi les
nombreuses bonnes idées suggérées, une très agréable soupe de poisson
permet de déguster la richesse des produits de la mer de la côte
portugaise. Les esthètes plus terriens jetteront leur dévolu sur un
sublime foie gras fait maison qui n'a rien à envier au Sud-ouest français
! Servi sur une fine pâte de figues relevée de chocolat, l'association,
après avoir étonné, séduit immédiatement. Pour accompagner cette cuisine à
la fois raffinée et en même temps sûre d’elle, le sommelier nous fait
découvrir un vin rouge du Portugal particulièrement délicieux, « T »
Quinta da Terrugem cuvée 2001 dont la robe attire l'oeil par son rouge
profond nourri au soleil lusitanien...
Faisons honneur à l’un des plats les plus traditionnels du Portugal, le
fameux Bacalhau, préparé de main de maître par le chef Bertillo Gomez. Le
résultat est surprenant. La morue devient goûteuse et tendre grâce à une
habile préparation, les pommes de terre rôties s'harmonisent avec les
jeunes pousses de brocoli pour former un trio réjouissant. C'est bien là
une démonstration convaincante qu'il est possible de reprendre les
recettes traditionnelles de la cuisine du patrimoine, tout en les
proposant dans une interprétation raffinée à la manière de ces airs
populaires repris dans les meilleures musiques classiques.
Le service se déroule selon un rythme calme qui permet d'apprécier la
douceur des lieux et le sommelier suggère de découvrir un porto vintage,
une idée remarquable tant ce vin goûteux réserve une pause hédoniste
permettant d'apprécier ce que nous avons découvert de l’art du brillant
chef opérant dans ces lieux.
La carte des desserts satisfera les gourmets et les gourmands ! Il faut
avoir dégusté ce chaud-froid de meringue de citron avec un granité de
fruits rouges particulièrement savoureux. Les amoureux de cuisine
traditionnelle jetteront leur dévolu sur un grand classique de la cuisine
portugaise avec le Sericaia, gâteau accompagné d'une surprenante jelly de
fraises et d'une boule de glace de fromage de chèvre !
Au final, on se dit que le chef Bertillo Gomez est un magicien : il vous
propose une cuisine à la fois inventive et en même temps assise sur de
grands classiques, savoureuse et audacieuse, mais toujours rattachée à des
fondations rassurantes. La Casa da Comida parvient à réunir tout cela avec
harmonie dans un cadre inspirant propice à l'évasion, une adresse à
retenir dans sa découverte de la ville ! |





Casa da Comida
Travessa das Amoreiras, Nº 1
1250-025 - Lisboa
Telefones: 21 388 53 76 / 21 386 08 89
Fax: 21 387 51 32
E-mail: geral@casadacomida.pt
www.casadacomida.pt
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LA MAISON DES ARTS & METIERS
...Un art de la table, un art de vivre...
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Je marche avenue
d’Iéna, je vais dîner à la Maison des Arts et Métiers, au numéro 9 bis.
Après Polytechnique à l’hôtel Poulpry, voici les Arts et Métiers. Mon père
serait content. Enfin le promeneur gourmand fréquente les grandes écoles,
du moins leur cantine. La maison s’appelle l’Hôtel d’Iéna, bâtie en 1895,
elle est depuis 1925 le siège des ingénieurs des Arts et Métiers et depuis
quelques années un restaurant ouvert au public.
C’est l’été. Le soir tarde à tomber. Il n’y a plus grand monde. Des
voitures circulent. L’avenue, les contre-allées, les beaux immeubles dorés
de lumière ont une allure fantomatique. Je ressens une légère inquiétude :
drôle d’endroit pour un restaurant… L’avenue d’Iéna va de l’arc de
triomphe de l’Étoile au jardin du Trocadéro, elle est
arquée, solennelle, pentue sur une partie de sa course, mais ce sont
surtout ses portes cochères qui intriguent. Plein cintre, en anse de
panier, monumentales, de bois massif, peintes en bleu foncé, en marron ou
en vert sombre, elles s’ouvrent sur d’autres portes réduites, les
anciennes cours souvent recouvertes, les halls qui désorientent par leurs
proportions. Que cachent-elles vraiment ? Elles scandent de leurs courbes
imposantes la succession des façades auxquelles elles impriment une
physionomie aussi majestueuse que déserte. Il n’y a plus personne. Le
prince, le président, le ministre, le directeur général, le consul est
parti, on a laissé un concierge portant cravate et mélancolie.
Napoléon, lui, est très présent. Ces parages se nomment Iéna, Lubeck,
Friedland, Kléber et je feuillette ces pages de l’Empire en somnambule. On
croirait le tableau du Sacre de David dont on aurait enlevé les
personnages. Je pourrais m’en amuser si je ne craignais pour mon repas.
Hmmm, Napoléon I revisité par le Second Empire autour de l’Arc de triomphe
de l’Etoile, une classe d’entrepreneurs, d’industriels, de financiers
bâtissant leur palais dans ce nouveau Paris, une méritocratie de
polytechniciens, d’ingénieurs des Arts et Métiers, d’audacieux, leurs
grands ancêtres s’illustrant à Austerlitz, Iéna, Wagram, laissant à
d’autres Azincourt, Jean II Le Meingre, Charles d’Albret, et élevant ce
quartier sous l’œil débonnaire d’Osman Pacha (1)...
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...Mon repas se
trouve derrière une de ces portes cochères… Elles n’ont ni patine, ni
usure, elles n’ont presque servi à rien, voilà leur drame ! On n’a guère
entendu le claquement des chevaux sur les pavés, senti le picotin
d’avoine, le cuir du harnais, vu la croupe des pouliches à la lueur des
becs de gaz, les pépites du crottin. Très vite, à peine quelques dizaines
d’années, le vroumvroum, les vapeurs d’essence des Delage, des De
Dion-bouton, des Hispano-Suiza ont recouvert ce fredon, les chauffeurs ont
soulevé leur casquette. On a raté le coche ! Et à moins d’avoir un ego
démesuré, d’être président, ambassadeur, fondé de pouvoir, ces portes sont
bien trop hautes, trop grandes pour un homo sapiens et l’avenue d’Iéna a
un très fort coefficient d’évanescence.
Si ma chronique n’était pas gourmande, je vous parlerais de ce coefficient
d’évanescence qui s’élève à des hauteurs insoupçonnables dans certains
quartiers parisiens.
Délicieusement
assis à une terrasse, buvant une gorgée de pinot noir d’Alsace, cave de
Turckeim 2005, respirant la douceur de l’été, j’ai franchi la porte
cochère du 9 bis sans trop d’encombres, traversé une salle aussi spacieuse
que lumineuse, et me suis installé à une table dehors à l’ombre.
J’ai à choisir entre une « rémoulade de tourteaux, poivrée de radis, crème
aigrelette », « une soupe froide de courgette au parmesan » et « un confit
de pigeon et foie gras de canard ». Je me résous à ce dernier. Bien m’en
prend tant le confit est goûteux. J’aurais bien croqué une petite cerise
sûre qui se serait mariée avec la succulence du gibier. Je regarde les
arbres de la terrasse. Trois magnolias étincellent au soleil et au-dessus
derrière la grille en haut d’un mur débordent de lourds feuillages un
tilleul et un marronnier. Il y a là un amphithéâtre de verdure et même à
main gauche, une drôle de tour faussement médiévale à l’extrémité d’un mur
aveugle avec fenêtres en ogive.
Puis une dame à sa haute fenêtre
Blonde aux yeux noirs en ses habits anciens
Que dans une autre existence peut-être
J’ai déjà vue et dont je me souviens.
Caprice posthaussmannien qui date de 1895, ce n’est même pas un escalier,
on l’a érigée Dieu sait pourquoi et sur le mur aveugle qui la jouxte, on
aurait pu lire à une autre époque Du bon, Du bon, Dubonnet. Il y a de quoi
se réjouir. La terrasse de la Maison des Arts et Métiers me fait découvrir
la doublure bien plus précieuse que le manteau de l’avenue d’Iéna, une
fantaisie de coulisse inespérée. Derrière cette tour, cet immeuble, ce
décor, rue de Lubeck, des maîtres Zen ont construit dans l’annexe du musée
Guimet un pavillon de thé entouré d’eau, de petits ponts et de roseaux,
tandis que les jeunes filles de l’Assomption, de l’autre côté de la rue de
Lubeck, ont perdu cet uniforme, jupe bleue, chemise blanche, qui m’a fait
tant rêvé adolescent. Voilà enfin un quartier !
On me sert un pavé de sandre très légèrement panné assorti de petits pois
craquants et un jus frais comme du citron ou des agrumes ; le Turkheim
2005 a bon air en s’ouvrant ; le soleil vient de quitter la terrasse et
muse encore dans le feuillage du tilleul.
Si j’avais pratiqué l’argot des Gadzarts, surnom que se donnent les élèves
ingénieurs de l’école des Arts et Métiers dont le siège est, je le répète,
depuis 1925 dans cette maison, j’aurais dit :
— Zabon ! en prenant entre mes zadoigts mon verre de pinot noir usant de
ce zargot unique. Oh ! jeunesse dont la devise est « fraternité », quel
plaisir de me retrouver dans ta maison où vous vous réunissez depuis tant
d’années, noble demeure des Gadzarts.
Et le dessert, je n’allais pas manquer le dessert. Je choisis un
mille-feuille à la framboise. Ce n’est pas un gâteau simple, il a les
difficultés contenues dans son nom. Il lui faut à la fois éviter la
lourdeur de la crème et du feuilleté, et accomplir sa mission de
rassasier. A trois étages, un feuilleté craquant au rez-de-chaussée, une
douzaine de framboises fraîches sur un nuage de crème au premier et le
même feuilleté au second. Simple, efficace, exquis.
Bref, croyez-m’en, de cette terrasse d’été, l’avenue d’Iéna n'est pas mal du
tout.
Andréa de Lauris
1. Surnom attribué au baron Haussmann. |


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Situé au 9 bis, avenue d'Iéna (16ème arrondissement), au
centre de Paris, à égale distance de la place de l'Étoile et du Trocadéro,
la Maison des Arts et Métiers met
à votre disposition
sa ravissante terrasse, ses salons d'exception ainsi que sa très belle
salle de conférences.
www.maison-artsetmetiers.com
Service Commercial Evenements privés : 01 40 69 27 69
Service Commercial Entreprise : 01 40 69 27 07
Réservation Restaurant
01 40 69 27 53 |
Le restaurant La Veranda
Hôtel Four Seasons - Milan
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Interview Sebastiano
Spriveri
chef en second du restaurant La Veranda
Hôtel Four Seasons - Milan |

Milan, c’est le Duomo,
« Deux mille cinq cents — on dit cinq mille— statues lancées en l’air
comme un peuple qui s’y promène et converse éternellement, tant les
aiguilles de marbre qui leur servent d’appui sont légères et effilées.
»*
Milan, c’est la Lombardie, le lac de Côme, le lac Majeur, les Borromée,
les Sforza, les Visconti, c’est Stendhal croisant les belles Milanaises et
se précipitant comme un maniaque à la Scala où l’on joue Cimarosa, le pays
du bonheur, Milan, c’est cette guirlande d’églises sublimes, ces fresques,
le peintre Bernardino Luini reconstituant le déluge en une bande dessinée
haletante, Milan, c’est…, comment finir cette énumération…,
Et c’est aussi …. La Veranda.
Si l’on ne peut visiter l’Italie, même mécréant, sans entrer dans les
églises, il ne faut pas oublier la ou les cuisines italiennes, ses vins,
ses douceurs, ses Parme, ses ricote, ses gelati, cette
dolce vita que le visiteur ingrat feint d’ignorer dans la fraîcheur
d’une chapelle, devant un carton de Raphaël ou une statue de Michel-Ange,
cette gastronomie heureuse, ce mille feuille de plaisirs dont la Veranda
est un des temples à Milan.

Le restaurant s’ouvre sur un cloître à fine colonnade de granit. Un jardin
carré, à arbustes géométriques, presque zen, invite à la paix de l’âme que
la salle recueille par ses baies vitrées. La lumière du soir, les lustres
vénitiens brillent, le couvert chatoie sur les nappes, on éprouve une
sensation de terrasse, de bel été.
Sise Via Gesù, petite rue tranquille, dans cette précieuse coquille
du couvent Santa Maria de Gésù datant du quinzième siècle, transformée au
dix-huitième en Palazzo d’Ada, la Veranda est le restaurant de l’hôtel
Four Seasons, fleuron de la chaîne. Il s’y est installé il y a quelques
années avec le souci d’exprimer le génie du lieu.
Beau souci que partagent Sergio Mei et Sebastiano Spriveri, les deux chefs
qui recherchent les produits frais du marché, animés par ce goût du
terroir, de la proximité, de cette Lombardie, de ce Piémont, de cette rue
adjacente. Ils sourient, Milanais d’adoption, de la monotonie de la
cuisine internationale et insistent sur le fait que c’est rien du tout ce
bric-à-brac ! L’assiette a un devoir de franchise, de vitalité, elle ne
doit pas s’embrouiller dans les voiles des sauces compliquées, se perdre
dans les sophistications. Elle a juste le droit du masque, de la fantaisie
d’Arlequino et de Pulcinella qui sont du cru**!

On s’essaiera à la combinaison d’un jambon d’Aoste, d’une fleur
d’aubergine, d’une figue et d’un melon.
Et cette soupe froide de tomates avec de la ricota tendre comme une
crème fouettée et savoureuse. On accompagne cette simplicité et ce
foisonnement d’un vin de Lombardie léger, boisé et subtil. Puis on passera
au chaud. Je me souviens de ces spaghettis aux courgettes naines à l’aneth
bordées de coques. Et d’un rizotto jaune comme un flan marié à un osso
bucco moelleux. La dernière note de cette suite italienne sera une mousse
aérienne de panacota mangue.
A Milan, on se donne l’adresse de la Veranda comme un billet doux.
Andrea de Lauris
*. Marceline Desbordes-Valmore
**. Bergame |

LEXNEWS : « Quel a été votre parcours qui vous a
amené à être le chef en second au Four Seasons ? »
Sebastiano Spriveri : « Je suis originaire de Sicile et j'ai été formé
par le chef Sergio Mei, puis je suis devenu son assistant. Sergio Mei est
natif de Sardaigne, donc une certaine complicité nous unit quant à la
cuisine italienne... J'ai tout appris de Sergio Mei et je dois vous avouer
que c'est un peu comme un mariage avec lui !
Une véritable philosophie nous unit et le plus souvent, il n'y a même pas
besoin de mots pour l'exprimer, un regard sur une décision à prendre
suffit pour régler la question. Autrement, il n'y aurait pas de place pour
deux conceptions différentes dans une même cuisine... »

LEXNEWS : «Quelle est la philosophie de votre cuisine ? »
Sebastiano Spriveri : « La philosophie de Sergio Mei, et à laquelle
j'adhère totalement, c'est un retour de la cuisine au goût. Cela a l'air
simple à dire, mais de trop nombreux chefs internationaux ont oublié cela.
Le client devant son menu ne sait pas ce qui va lui arriver ! Il ne
comprend pas le nom des plats, n'a aucune idée de l'association des mets,
ni quel goût cela va avoir. Cela entraîne trop souvent des déceptions, et
on ne peut pas accepter cela en cuisine. Sergio Mei et moi-même insistons
pour que les plats parlent à ceux qui vont les manger. Cela doit
directement être évocateur et aller droit au coeur. Nous disons souvent :
« retournons aux racines de notre art ! », il faut cesser cette
intellectualisation de la cuisine qui conduit à de trop grands dérapages.
La meilleure preuve, c'est que nos clients, pour un grand nombre d'entre
eux habitués aux grandes tables internationales, reviennent très souvent,
parfois même deux fois par semaine, parce qu'ils sont heureux et ont le
plaisir de retrouver une cuisine sensuelle et accessible. Cela ne veut pas
dire qu'il s'agisse d'une cuisine facile : il y a un tour de main, une
connaissance technique, un choix exigeant des bons ingrédients, leurs
associations habiles... Tout cela demande du temps et un grand savoir et
c'est à cela que nous croyons. Comme je vous le disais tout à l'heure,
Sergio Mei a une véritable philosophie qui s'exprime par une cuisine
humaniste. »
LEXNEWS : « Comment caractériseriez-vous la cuisine que vous pratiquez
avec Sergio Mei dans les restaurants du Four Seasons ? »
Sebastiano Spriveri : « Nous sommes très exigeants quant au choix des
ingrédients, leur provenance, leurs associations. Nous travaillons avec
des fournisseurs depuis de nombreuses années, ce qui est un signe de la
régularité de la qualité de leurs produits. Nous avons plaisir à proposer
des plats traditionnels italiens dont nos clients raffolent : un
osso-buco, un risotto traditionnel, et même des spaghettis cuisinés dans
les règles de l'art ! Ne vous y trompez pas, cela demande un travail
souvent ignoré, une connaissance de la cuisson des ingrédients qui a
tendance à se perdre aujourd'hui. Nous pouvons beaucoup apprendre des
classiques d'autrefois et à partir de là à improviser et créer sur cette
base solide. Pour nous, il ne saurait y avoir d'improvisations sans
fondations !"  |
Le Restaurant La Maniera
di Carlo - Milan |
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Pour goûter aux charmes de la cuisine italienne authentique tout en
profitant d’un décor à la fois jeune et raffiné, il faudra frapper à la
porte du restaurant La maniera di Carlo dont le nom évocateur est un
hommage au père disparu et aux bonnes manières qu’il a su léguer à ses
enfants. C’est en effet à partir d’une idée de Francesco Germani en
septembre 2009 qu’est née cette table désormais saluée par les critiques
et appréciée d’une clientèle milanaise de plus en plus nombreuse. Le jeune
restaurateur bien introduit dans la société milanaise a souhaité que cette
adresse reflète « un ensemble de bonnes manières qui satisfassent tous
les sens, qui évoquent les souvenirs des traditions oubliées, qui fassent
regarder vers le futur avec optimisme et vivre le présent de manière
enthousiaste ». Autant dire que le but est atteint, car la cuisine de
toute première qualité est à la fois une ode aux meilleures traditions
culinaires italiennes tout en s’autorisant des excursions originales sur
des voies culinaires hors des sentiers battus. Nous sommes dans l’élégance
soulignée par l’atmosphère raffinée sans affectation d’un lieu propice à
une rencontre informelle entre amis.

La cuisine est à l’image du cadre dans lequel elle est
servie : à la fois authentique et soignée. Les produits à la base de la
cuisine proposée font l’objet d’une recherche méticuleuse qui est
immédiatement perceptible dans des entrées où des petites salades de
tomates cerises confites avec des morceaux de pastèque se disputent la
primeur avec du guacamole réinterprété ou encore de petites
verrines de compotes de légumes (...)

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(...)
Les goûts sont à la fois simples et en même temps d’une association sûre
et mature. Cela est d’autant plus surprenant que le jeune chef talentueux,
Lorenzo Santi, n’a que 25 ans et que les plats proposés donnent
l’impression d’une longue expérience acquise pendant des années à la
chaleur des fourneaux. L’excellence du choix des fournisseurs qu’il
s’agisse de l’huile d’olive choisie chez les meilleurs producteurs, des
jambons de Brianzoli, des produits de la Toscane ou des charcuteries
siciliennes est au menu de ce restaurant qui offre une véritable carte
géographique des produits de la péninsule italienne. Le pain, les gressins
et la pâtisserie sont faits maison et la carte des vins déploie un
éventail de 250 étiquettes nationales ainsi que de nombreux champagnes…
 
Le poisson mérite à lui seul une note de tout premier plan. Frais et
savoureux, ils sont proposés avec différents accompagnements de légumes
qui sont un régal pour les yeux et le palais ! Il faut aussi avoir goûté
aux tagliatelles aux orties et au risotto aux herbes aromatiques et aux
figues caramélisées pour réaliser qu’avec une telle table, nul doute que
les bonnes manières culinaires seront préservées pour de nombreuses années
dans la ville de Milan !

Jour de fermeture : samedi midi et dimanche
Via Pietro Calvi, 2 - 20129 Milano (MI) - Parcheggio Convenzionato Piazza
Risorgimento Nord - Tel. +39.02.76024261 - Fax +39.02.76317098
www.lamanieradicarlo.it
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LA TOUR EIFFEL - LE 58 |









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La Tour Eiffel, le 58
Les rapports mystérieux qu’entretiennent la typographie et le sens, voilà
une question bizarre pour un promeneur gourmand se rendant à la tombée du
soir au 58, le restaurant du premier étage de la Tour Eiffel. « Laisse le
mot s’animer », me dis-je en descendant du Trocadéro et en sentant mes
papilles gustatives encore assoupies, espérant que celles de mes lecteurs
le soient aussi tant la Tour et ses détours me tiennent à distance des
agapes promises.

La douce dame veille sur la Seine, chic en sa robe puddlée, aussi poreuse
au velours bleuté de la nuit que mutine aux mirobolantes caresses des
kilowatts, à ses myriades de phosphorescences sur sa peau. Elle secoue ses
cheveux de métal, m’attend (oui, oui, bien sûr, pourquoi ne pas penser
ainsi).
« Saint Jérôme » (Peignot) murmurais-je, mystique soudain et ruminant bien
autre chose que des pintades rôties ou des ortolans dorés, invoquant «
l’érotisme spatialiste » en la contemplant sur l’autre rive, girafique,
somptueusement étirée vers le ciel.

Eiffel, FL, ce nom ! quelle chance ! quelle fortune ! il en aurait été
évidemment tout autrement, j’ai même idée qu’on n’aurait pas de tour du
tout si Alexandre Gustave* s’était appelé platement Martin. Il y va de
l’esprit, que dis-je de l’esprit, de l’essor typographique ! Son nom l’a
haussée à 313 mètres ! Voilà la conclusion à laquelle je parviens en
m’engageant sur le trottoir du pont d’Iéna, blanchi par la lueur des
phares et reblanchi par le Capitaine Fracasse, bateau-mouche tout facetté
de lumière, tandis qu’une lueur d’intelligibilité poursuit son chemin sous
ma voûte crânienne. Je longe un manège, croise neuf Japonaises à petite
jupe bleue et intonations ravies, respire une odeur sucrée de barbe à papa
dans la mitraille des flashs.

Le
mot vibre, s’anime. Alpinistes, les syllabes prennent de la hauteur. La
majuscule du E culmine avec le fuselage du doublement du f que le l final
rejoint d’un trait. Eiffel. Vertige. Vertige, mais il y a mieux, il y a un
truc, une cachotterie, dans cette gerbe de lettres, un trésor, c’est ce i
minuscule qui est pourtant bien là et qui disparaît à la prononciation
comme s’il n’était qu’une ligature, ces petites arabesques qui relient
entre elles les lettres qui copulent, ou le secret de ces armatures de fer
que le lecteur gourmand peut découvrir — en trompant sa faim— dans la
trépidante étude d’Eiffel : Le fonçage par pression hydraulique des piles
et qui fit d’Alexandre Gustave le sublime ingénieur que l’on sait.

A Eiffel la tour, à Fulgence Bienvenu le métropolitain et à moi le 58, me
dis-je modestement en sentant le mécanisme de l’ascenseur me propulser
vers les hauteurs dans un des immenses pieds d’acier de la dame tandis que
là-haut, le faisceau vernien tourne et arrose de son trait de pinceau
éclatant nos vingt arrondissements chavirant dans la nuit.
Me voilà enfin dans une forêt de métal à 58 mètres au-dessus de la Seine,
et brave ogre de ville, attablé devant un simple petit délice. Je l’ai
toujours dit, la vraie gastronomie, c’est un œuf frais ramassé sous la
poule, dégusté à la coque avec un jaune consistant tirant sur l’orange,
une pincée de sel, une mouillette et le roi n’est pas mon cousin. Ici la
recette est solognote, sent le braconnage, la gibecière. Imaginez un œuf
mollet croustillant, la coquille facétieusement remplacée par une panure,
nappé d’une sauce meurette et entouré d’oignons grelots. Une saveur de
bourgogne fruité au diapason de cette impression de sous-bois que dégagent
les poutrelles de fer, le camaïeu de marron, l’ombre d’un décor
minimaliste et les vallées éclairées là-bas, la rivière en dessous avec
ses bateaux comme des jouets. On me sert un côte de Beaune à tannins
légers et une côte de veau cuite au sautoir à la chair rose, fondante,
juteuse. Je me sens de plus en plus ogre. Du haut de mes 59 mètres, je
dévorerais bien une bouchée de Trocadéro, la brioche dorée de la coupole
des Invalides, le vol-au-vent du Val de Grâce et le gâteau en sucre du
Sacré Cœur. Je me pourlèche les babines, me perds dans le fourmillement de
voix étrangères, japonaises, germaines, chinoises, anglaises,
espagnoles...
J’ai un atlas sonore à mes côtés, Paris à mes pieds et la fourchette à la
main, je suis ogre. C’est le 58. Ah, Alexandre Gustave, c’est unique !

Lyonel Nowitz, le maître de céans, me parlera de la double vie du 58. Le
pique-nique chic du matin et le dîner brasserie du soir. Il me rappellera
les six millions de visiteurs annuels qui ne sont pas Rockfeller et dont
certains rêvent de casser la croûte sur la tour Eiffel ; il dira le menu
prestidigitateur mis au point avec pièce de bœuf confite, hamburger,
salade Caesar ; le self service pratique ; le temps compté — un repas
c’est 43 minutes (on se croirait dans Le testament de Monsieur Pump**) ; et
cette gageure d’un millier de repas journaliers servis à un moindre coût
en altitude. Lionel Nowitz mimera la mère de trois petits enfants
réussissant grâce à un astucieux panier-repas à nourrir sa progéniture. On
peut sourire évidemment, mais quel exploit, combien de familles réjouies,
c’est beau comme la multiplication des pains même si je remercie
hypocritement le ciel de ne pas être la maman de trois petits enfants et
d’être au 58 le soir plutôt que le matin.
Andrea de Lauris

*. Il força un peu la chance. Avouons-le. De son
vrai nom Bönickhausen, le nom d’Eiffel était le second nom qu’il prit en
1879. Il est tiré d’un lieu de naissance de son arrière-grand-père du nom
d’Eifel, massif boisé d’Allemagne. Notons le redoublement du f et la
neutralisation du i. Nom imprononçable, dit Alexandre Gustave, ou plutôt à
résonance allemande, et après le désastre de Sedan, la tour Bönickhausen
n’aurait pas recueilli tous les suffrages. D’ailleurs, juste un nom à
construire des ponts, mais certainement pas à s’élever dans le ciel…
**. Le testament de Monsieur Pump (un des albums de Jo, Zette et Joko), le
plus beau début d’un Hergé, aussi beau que celui de L’étoile mystérieuse.
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www.restaurants-toureiffel.com/restaurant-tour-eiffel-58.html |
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Restaurant Lapérouse |



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Lapérouse
Navire en vue…
Le statut de promeneur gourmand n’est pas de tout repos. Comme ce soir de
début mars, à la nuit tombante, où marchant, je le précise, à jeun (pour
le directeur de Lexnews et mes chers lecteurs), Quai des Orfèvres, je vis
de l’autre côté du fleuve sur le quai des Augustins, encastré dans un
immeuble parisien s’enfonçant, non sans grâce, dans l’immense cité, la
poupe du navire La Boussole de l’expédition Lapérouse, celle qui disparut
corps et biens au large de l’île de Vanikoro en 1788.
Je me frottais les yeux, incrédule, comme un de ces acolytes d’Adèle Blanc
Sec découvrant au-dessus du Pont-Neuf un ptérodactyle.
Paris regorge de ces fantasmagories, me dis-je pour me rassurer.
Il faisait un petit vent, l’air était frais sans être froid. Les boîtes
vertes des bouquinistes bleuissaient, la lune se posait sur la pierre des
quais, quelques fumerolles de brume taquinaient à la lueur des réverbères
le tablier du pont Saint-Michel.
Lapérouse,
c’était justement ma destination ce restaurant, et je pressais le pas,
craignant de rester sur ma faim et que la poupe disparût dans l’entrelacs
des immeubles. Trop bête qu’une crampe d’estomac surprît le promeneur
gourmand ! C’est dire qu’anxieux je regardais la poupe qui semblait
heureusement immobile. On eût dit celle d’un vaisseau de premier rang :
les membrures de la coque, lisse et contre lisse, la marqueterie d’un vert
céladon
nocturne, les termes soutenant la galerie, les sabords, les fanaux allumés
au-dessus des embruns et le couronnement de la poupe déjà mangé par
l’étage supérieur de l’immeuble.

Quel réconfort de me trouver au premier étage assis dans un délicieux
petit salon dix-huitième boisé entouré de scènes de chasses, de
pastorales, de miroirs, une fenêtre sur la Seine et cet étrange navire qui
ne bougeait pas d’un iota.

Sur
la table dressée, un lys s’ébrouait. Le cœur de Paris, —le Paris des rois,
le vieux Paris — battait autour de moi.
J’avais été mené par une accorte damoiselle à travers des coursives,
j’avais vu d’autres petites chambres précieuses, des divans cramoisis, des
singes grimpant à des arbres en fleurs, des lustres de cristal poli.
Jamais on n'avait ainsi fait tourner la tête du promeneur gourmand !
Je me demandais bien quelles rêveries assaillaient les autres passagers de
ce — comment le nommer— bateau, théâtre, restaurant ?

Je
vois déjà deux ou trois lecteurs aussi furibonds qu’affamés, je les
entends qui protestent, il y en a même un qui jure. La révolte gronde !
Qu’est-ce que cette fichue chronique ? on ne s’est encore rien
mis sous la dent ! J’y viens, j’y viens et est-ce ma faute à moi si Lapérouse est une grotte obscure, un songe, une île ?
J’ouvre le bal par une truffe noire du Périgord sur une mousseline de
p anais. Drôle de légume
oublié un peu sucré, un peu fade qui a l’aspect d’une carotte blanche et
se marie avec l’énigmatique Tuber melanosporum, vous savez, celle qui
pousse capricieuse sous un chêne du Sarladais. Le sommelier très disert,
il fait parler les bouteilles, me conseille un Château d’Aiguilhe, un
Merlot qui par ses rondeurs apprivoise la truffe. J’aurais pu opter pour
le foie gras de canard en variations, frais, cuit, ou en brique, avec son
sirop de sureau sauvage. Mais la truffe, contrairement au foie gras, me
laisse toujours sur ma faim, m’enchante un peu et c’est cet un peu qui fait
pour moi tout son attrait.
Puis,
entre les plats ces bouchées d’attente pour les impatients, le chef
Jean-Sébastien Pouch, botaniste à ces heures y glisse des violettes, des
pensées, des émulsions de coquelicot, une fantaisie agreste qui vou s
fait regarder autrement les parterres floraux, les sous-bois. On s’amuse
et c’est bon. On aime bien cette liberté chez un chef.
La
sole est farcie de cébettes, cousin pied-noir de l’oignon, cuite en vapeur
d’algue avec du céleri et de la pomme verte. C’est succulent, même si
parfois la sole se perd et qu’on ne la retrouve que de manière
intermittente parmi les saveurs méridionales.
Mais ceux qui ont encore faim, que ces violettes, ces tuber melanosporum,
ces pensées, ces pommes vertes n’ont pas nourris peuvent aussi prendre des
pieds de cochon, « panés croustillants à l’infusion de marjolaine,
poitrine grillée, écrasé de rattes à peine truffé, côtes de romaine
sautées au Xeres. »
En
partant, je regarde la poupe du navire La Boussole, quai des Augustins.
Encore là, tissée de rêves du grand large, du vieux Paris, c’est si
précieux, mais pour combien de temps… J’appris que Jules Lapérouse, un
homonyme du navigateur, un des propriétaires du lieu, était un marchand de
vin. Un marchand de vin, un capitaine au long cours, du même nom ! mieux
que Sancho Panza et Don Quichotte !
Andrea de Lauris
Restaurant Lapérouse
51 quai des Grands Augustins
75006 Paris
Tel: +33 (0)1 56 79 24 31
Fax: +33 (0)1 43 26 99 39
www.laperouse.fr/restaurant/
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Restaurant gastronomique « Le Poulpry »
Maison des Polytechniciens
Je me souviens de Claude Lévi-Strauss expliquant, amusé et sérieux aux
académiciens songeurs, porteurs de bicorne et d’épée combien ils se
rapprochaient d’une tribu d’Indiens du Canada. Qu’aurait-il dit de notre
polytechnicien et de son bicorne aérien aux cornes si recourbées qu’on
dirait qu’il va s’envoler ? Et de cette tangente qui est le nom de son
épée parce qu’elle est tangente à la bande rouge de son pantalon
d’uniforme? J’avais noté la phrase un peu solennelle de l’ethnologue à
laquelle je souscrivais en tant que promeneur gourmand épris d’un
couvert bien mis et de signes d’hospitalité : « Il faut bien que ces
rites soient l’expression d’une sagesse infuse et qu’ils s’enracinent au
tréfonds de la nature humaine. »
M’y voilà enfin à Polytechnique ! me dis-je, pas peu fier d’avoir doublé
Stendhal l’admirable, qui comme on le sait ne se rendit pas à
Polytechnique en ce morne mois d’octobre 1799. Le Rouge et La
Chartreuse l’attendaient.. Autres rendez-vous, dira-t-on. Quant à moi,
je n’avais que celui-là et j’étais heureux de prendre la petite rue de
Poitiers, sise près du musée d’Orsay, de m’arrêter au numéro 12 devant un
vieil hôtel particulier datant du Grand Siècle. Une enseigne indiquait «
Le Poulpry, restaurant gastronomique ». Je n’eus pas à montrer patte
blanche. Le restaurant de l’école Polytechnique était ouvert à tout vent.
On y déjeunait, dînait dans un de ses salons et c’était une de ses haltes
chères à quelques voisins du quartier, le bouche à oreille avait même
atteint le Palais-Bourbon et commençait tout juste à traverser la Seine.
D’ailleurs j’étais moi même un indigène de la rive droite et la bonne
nouvelle m’était parvenue : les x accueillent Monsieur tout le monde dans
leur restaurant!
Fort de ce titre, j’entrai dans le vénérable hôtel, juste avant la belle
cour intérieure, j’empruntai à main gauche un escalier comme si je me
rendais chez un ami. Une entrée. Plusieurs salons. On m’introduisit dans
le plus spacieux, jaune, à boiseries dix-huitièmes, et je songeais que
Maison elle était restée par ce caractère familier, intime, de bon goût.
La coterie de l’école en s’ouvrant n’avait curieusement rien perdu de sa
fratrie bourgeoise et c’était une impression agréable, un peu troublante.
La table était mise. Jean allait saluer Paul.
Le repas fut léger, aérien, subtil. Maritime aussi. Un instant je songeais
que dans Poulpry, il y avait poulpe et je me perdis dans une aimantation
de syllabes à dormir debout. Après un drôle de médaillon appelé tartare
mariant le magret et la Saint-Jacques où la combinaison me trouva plus
étonné que ravi, j’eus une succession de plats délicieux entre lesquels on
me servit un aimable Sancerre rouge, cuvée Mellot 2008.
Inoubliable
consommé de homard, si goûteux, si suave, j’aurais dit une mousse, et ses
deux ravioles farcis de crabe. Ah ! chair tendre, saveur de ces cuirassés
des profondeurs.
Mais qu’est-ce que le plaisir d’un plat, comme il s’évanouit vite, s’il
n’est suivi d’un autre et c’est dans la succession seule qu’on enchante, a
dû se dire le chef aussi philosophe qu’avisé. Le renchérissement, c’est
l’art du menu — comme son nom ne l’indique pas !. Aussi bienvenu fut le
homard cuit à l’étouffée, fenouil, artichauts, asperge à la réglisse. Il
était flanqué de deux pinces de crabe et comme en écho du plat précédent.
Les légumes frais étaient juste cuits, craquants, vifs sous la dent et
répondaient fermement à la chair des crustacés. L’invention était là et
j’en félicitais Nicolas Pastot, le chef, homme de modestie et
d’imagination qui avait un peu du sourire du Chat d’Alice aux pays des
merveilles. Je pensais à ces équations grâce auxquelles on jette ces
passerelles légères qui franchissent le fleuve.
Mais que le rabelaisien, le carnassier se rassure —il s’en trouve parmi
mes lecteurs— le Poulpry offre aussi une variante du fameux tournedos
Rossini avec son filet de bœuf, fine galette de pommes de terre et fondue
d’échalotes, crème de foie gras.
Vous quitterez contents la Maison des Polytechniciens en fredonnant :
Il est un air pour qui je donnerai tout Rossini…
Andrea de Lauris

Restaurant Le Poulpry
La Maison des Polytechniciens
12, rue de Poitiers
75007 Paris
01 49 54 74 54
ouvert tous les jours
sauf le samedi et dimanche
www.maisondesx.com
le.poulpry@maisondesx.com |
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Yachts de
Paris
Dîner sur le Don Juan II
Février, neige
sur Paris,
les quais de la Seine, non loin de l’Arsenal
L’idée est folle, on part en croisière sur un yacht 1930 à la ligne racée,
on dîne délicieusement, et Paris, le Paris historique drapé de ses
vieilles pierres, de ses tours, de ses quais, vient à votre rencontre, le
Paris plus secret aussi, qui vit au fil de l’eau, la fée Electricité
ajoute sa sorcellerie, la Seine, ses reflets, et puisqu’on y est, les
météores, la neige s’en mêlent, comme ces boules de verre qu’on retourne
enfant.

On appareille
vers 20 H 15. La coque vibre légèrement, le quai Henri IV s’éloigne, le
roulis du fleuve me berce. Cap à l’Est, capitaine ! Vers le pont de
Tolbiac… Une flûte de champagne à la main, le salon cosy, des fauteuils
crapaud, l’acajou, le cuivre, un coin du feu, la neige qui tombe sans
discontinuer derrière la vitre et ses petits rideaux de théâtre. La table
dressée attend un peu plus loin. On arrive au pont de Bercy dans un Paris
futuriste coloré du vert pomme de deux énormes chenilles fluorescentes qui
s’accouplent sans pudeur rive gauche, c’est la Cité de la Mode et du
Design, petite sœur de Beaubourg qui ne deviendra jamais papillon… Et puis
il y a Bercy, la grande Bibliothèque et sa passerelle Simone de Beauvoir
argentée et arachnéenne (304 mètres, lentille d’acier de 650 t). Je fais
un rêve ? Non, je bois une gorgée pétillante et je me dis que le rêveur
est plat comme un personnage de
cinémascope, qu’il ne mange, ni ne boit. Je me le dirai toute la soirée
comme qui résiste à un sort.
Les hostilités
commencent, on vire de bord, on suit le courant et on remonte le temps. Je
suis assis et je goûte, entouré de châtaignes grillées sur sa crème de
cèpe, un foie gras poêlé. Il a des mystères de fondant, d’onctuosité que
seules certaines poires ont, —la mouille-bouche ou la cuisse-madame— et à
cause de ça je le préfère à l’autre foie. Je vendrais pour lui mon droit
d’aînesse si je n’étais pas le benjamin. Il est un peu plus que tiède, un
peu moins que chaud, a un arrière-goût de noisette, et la châtaigne
grillée, les cèpes viennent des sous-bois du Périgord. Un Chablis Louis
Max 2008 fredonne un petit air velouté, fruité.


On atteint le
Pont Saint-Louis qui relie les deux îles, on croise le Capitaine Fracasse,
vaisseau d’une vingtaine de tonneaux qui nous éblouit, braque ses
projecteurs sur nous, les arbres et les fenêtres, les arches. Cette
canonnade de bateau-mouche étonne un peu. Le Don Juan II n’est pas du tout
ce genre-là, me dis-je, en goûtant aux Saint-Jacques. Elles sont casquées
d’une croûte de noix et baignent dans une mousse à la truffe blanche. Le
croustillant de la noix et la chair du coquillage font bon ménage ; la
truffe est plus insaisissable ; je devine que c’est une idée et je fais
durer une gorgée de Chablis en songeant à cet étrange champignon.
Ce n’est qu’en dépassant la proue de l’île de la Cité et en me retrouvant
dans l’ampleur du fleuve, que je prends conscience du dispositif théâtral
du Don Juan II. Chaque table est une alcôve ou une loge d’opéra.
Trois plans s’emboîtent successivement :
D’abord, la table, sa nappe blanche, son bouquet serré de roses rouges,
l’étincellement des couverts, des assiettes, le pain dans sa soucoupe,
l’or et la pourpre des vins.
Puis, l’eau du fleuve derrière la vitre, dans son cadre d’acajou, les
rideaux noirs et blancs serrés dans leur embrasse, l’eau quasiment de
plain-pied que l’on découvre encore mieux quand le fleuve s’élargit tant
l’étoffe moirée de son cours se déploie, avec les superpositions, les
transparences de l’intérieur du bateau, la houle, les colliers nacrés de
l’électricité, les réverbères, les phares des voitures.
Enfin, comme un aria de diva, le décor de Paris, ici c’est la coupole de
l’institut, là le linéament délicat des toits, plus tard l’audacieuse Tour
Eiffel, et puis quelques vieux immeubles tordus près de la tour de TF1 qui
rappellent à bon escient que Paris c’est aussi des couacs !
Ajoutons la vibration du moteur, le bercement de l’eau. Jonas heureux dans
sa baleine.
En prenant une dernière bouchée du dessert appelé énigmatiquement pour moi
cube boisé surprise à la fève tonka, à la recherche du clou de girofle, (qui ne s’y trouve pas) je
cause avec un charmant serveur. Il me dit, répondant à ma curiosité que
l’armateur des Yachts de Paris, celui qui a eu l’idée du Don Juan II,
s’appelle Marc Bungener...

Je l’imagine. Ni
Aristote Onasis, ni Rastapopoulos, juste un homme qui ne se refuse rien.
C’est épatant, ça , non ?
J’ai une petite appréhension : vingt trois heures cinq, on est déjà à
l’île Saint-Louis… Il ne neige plus, l'aria va s'éteindre et le Don
Juan II accoster.

Andrea de Lauris
+33 (0) 1 44 54 14 70
reservations.dj2@yachtsdeparis.fr
(Chef: Jean-Pierre Vigato)
Port Henri IV 75004 Paris
embarquement à partir de 19h45
croisière de 20h30 à 23h15
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Un soir chez
Chaumette
Le seizième est énigmatique. Hormis le prévisible ton pincé, les syllabes
prononcées si vite qu’on les dirait avalées de ses indigènes, il réserve
quelques surprises. Et des bonnes ! Avez-vous déjà vu sur l’autre berge la
nuit la Tour Eiffel en pyjama lamé bleu, se mirer dans la rivière ? Ou
goûté à cette espèce de fausse brioche ronde, dorée la nuit, qui s’appelle
la Maison de la Radio et qui émet sur l’hexagone sornettes et sapiences ?
Ou filé la nuit Balzac fuyant ses créanciers par la minuscule rue Berton,
une des plus vieilles et des plus étroites rues pavées de Paris en
contrebas de la maison du romancier ? Le seizième, c’est la nuit, qu’on se
le dise..
C’est dire que nous nous sommes rendus la nuit, rue Gros, dîner chez
Chaumette. A cause du bois aussi qui prend au contact des appliques
d’extraordinaires couleurs de palissandre, de teck, d’acajou, de Yang Tsé
Kiang, de Stradivarius, dont les panneaux tapissent la brasserie et
présagent du bonheur d’un verre de vin de Bourgogne qu’on tient dans sa
main et d’une table bien mise.
Au mur, Dorade adorable, un jeu de mots de Gainsbourg qui ne savait
pas faire autrement, un à Bientôt de Brel qui a l’air de la veille,
on se retrouve dans l’éternité bien parisienne d’une brasserie de poche où
l’on va être pour vous aux petits oignons. Il y a de la malice et de la
tradition, juste le mélange qu’il faut et sur lequel veillent Thierry le
Gall au four et Charles Henri Poisson au moulin, deux trentenaires
dégourdis. Le déjà vu tient la main à l’étonnement. Double plaisir ! Comme
cet œuf brouillé aux truffes malignement servi dans sa coquille et qu’on
va chercher à la cuiller avec une sensation de familier. Ou ce crabe qui
se marie avec le potage au chou, rencontre savoureuse, inédite de la plage
et du jardin. Et cette croustine de foie gras qui accompagne la perdrix de
manière légère, nuageuse. Et puis cette carte si bien achalandée d’un pot
au feu, d’une escalope de foie de veau persillade qu’on voie encore les
Halles, le Ventre de Paris, là-bas, de l’autre côté de la rivière, ses
coltineurs au chapeau démesuré portant les quartiers de viande. On est
surpris qu’au lieu du bagou titi, le service soit délicat, charmant. Le
seizième est énigmatique et Chaumette manie l’art du contrepoint de façon
si gracieuse…
Andrea de Lauris

Restaurant CHAUMETTE
7 rue GROS
75016 PARIS
01 42 88 29 27
(fermeture samedi midi et dimanche) |




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Les Marches du Palais
Ariel Durand, Jean-Philippe Guiot, et son chef, Loïc Lobet
vous proposeront
leur nouvelle carte d'automne
dès fin septembre...
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Aux Marches du Palais...
Fin juin, ensoleillé, le soir
Aux Marches du Palais, c’est Paris, ce Paris qui recèle à un coin de rue
un passage, une échappée.
Des marches, il y en a une volée, autour de la centaine, qui descendent de
l’avenue du Président Wilson, sur une petite rue débouchant sur la Seine,
qu’on traverse par une passerelle métallique — vestige pérenne de l’Expo
1900—, pour accéder au Musée du Quai Branly.
De Palais, il faut aussi en convenir puisqu’en descendant on longe à main
gauche l’altier et néo classique Palais de Tokyo au pied duquel de
minuscules jardinets regorgent d’églantines, de roses trémières, de
fougères, de feuilles de rhubarbe, d’acanthe et même d’oreilles
d’éléphant. Étrange mosaïque que binent, taillent, amendent à la bouillie
bordelaise d’invisibles jardiniers. Ils font surgir des rouges, des
jaunes, des bleus d’une verdure aussi dense qu’étroitement contenue selon
une stricte géométrie de maison de poupée.
Le bistrot se tient en face à main droite en regardant vers la Seine dans
un semis de maisons anciennes. Il est une autre surprise de ce passage,
une raison, une bonne de s’arrêter.
Sous les pales du ventilateur, Loïc Lobet, le chef, nous dira sa joie
d’avoir croqué une fraise après une bouchée d’épinard. Laissez faire le
hasard et traduisez sur la carte par « une salade de pousses d’épinard et
fond d’artichaut vinaigrette à la fraise. » C’est léger, c’est vif, c’est
intempestif. Il nous fera goûter sur un même air – allegro andante— son
melon nantua, soupe fraîche au homard et au melon avec cerfeuil,
ciboulette et je ne sais quel arôme d’amande. Et ses gambas cristal bay
canaque à la chair si ferme, à la saveur de mérou et dont il est, avec
raison, si fier. Ajoutons qu’il sacrifie sans regret à l’un ou l’autre de
ses mets ses citrons qu’il fait confire lui-même et qui sont délicieux.
Mais il y a aussi de l’ogre chez ce chef, un bon ogre des villes bien
gourmand et plein de ressources et il peut nous jouer une autre partition
avec contrebasse et forêt solognote. « Je suis un fana de gibier, nous
dira-t-il. J’aime la bête tout entière avec sa peau ou ses plumes. » La
graisse s’y trouve, la fermeté, le moelleux, le juteux, le sec, c’est tout
un monde ! et apparaîtra sous nos fourchettes cette terrine fondante de
dos de lapin dans son jus « à cent pour cent lapin » précisera-t-il.
Certes, un peu hivernale pour la saison, mais si onctueuse qu’on ferme les
yeux.
Un vin de Chinon —la Diligence 2007— un de ces coches équipés pour bien
des chemins nous accompagne aussi bon homme et souriant que Sancho Pança.
Nous avons vu, nous avons goûté, nous avons aimé « Aux Marches du Palais
». Nous reviendrons au temps du lièvre et du faisan.
Andrea de Lauris

Aux Marches du Palais
5, rue de la manutention - 75116 Paris
tél. 01 47 23 52 80
ouvert tous les jours
sauf le samedi midi et le dimanche
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Côté Restaurant
Découvrez le menu Été de PETROSSIAN
"Le 144"
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Déjeuner chez Petrossian...
Je me souviens de l’émouvant livre d’Andreï Korliakov sur l’émigration
russe entre 1917 et 1947. Je me souviens de cette photo de 1931,
au-dessous d’une affiche « Frigorifique de Vaugirard », et d’une autre : «
Caviar Petrossian, sandwich 2 F. », au premier plan une table offrant de
petites boîtes noires en pile, en pyramides, des coupes, des canapés dans
une assiette, des conserves de cabillaud, de turbot du nord et derrière
alignés, la famille, peut-être les employés, hommes et femmes endimanchés,
plusieurs générations, tout sourire parce que venant de recevoir un
diplôme d’honneur et une médaille d’or pendant le salon de gastronomie au
Grand Palais pour leur caviar. La légende rappelait qu’en 1930 son
transport n’était pas chose facile : « On utilisait de gros fûts pleins
de glace, à l’intérieur desquels étaient empilées des boîtes en bois
contenant les boîtes métalliques remplies de caviar. Plus le trajet
durait, plus souvent on s’arrêtait pour changer la glace ! » Mouchegh
et Melkoum, les frères Petrossian, êtes-vous sur la photo ? Je ne sais, ce
que je sais par contre, c’est l’irrésistible ascension de la maison
Petrossian, l’aura de luxe, de savoir faire que ce nom dégage.
Il y avait ce jour de juin au Restaurant, 144 rue de l’Université, un air
d’été, les stores avaient été tirés et la lumière veloutée se réverbérait
dans les miroirs. On se sentait embarqué dans cette salle au premier
étage. L’équipage au petit soin, dehors, c’était la bonace. Paris sur mer.
Je goûtais d’abord à la coupe du Tsar qui se présentait comme une glace
avec sa crème de fromage blanc fouetté en guise de chantilly, ses trois
saumons fumés différents, goûts de curcuma, de citron, le moelleux et la
déclinaison subtile des chairs, et la surprise d’un fond d’artichaut caché
sous la neige. De malice et de surprise, le menu saisonnier n’en manquait
pas. Y soufflait une inspiration qui m’intriguait...
Le
sommelier me servit avec un rouget et sa rosace de légume — un délice
d’aubergine et de courgette faisant galette sans rien qui pèse — un verre
de Château de l’Engarran 2005, cuvée Andelys, un sacré blanc, il vous fait
voir du pays, presque liquoreux, on s’attend au sucre, et puis une retenue
de prince, un parfum d’écorce et d’agrume, on reprend une gorgée pour
comprendre son altesse : le même plaisir.
Je conseille aussi la brandade et crevettes qui se marient savamment.
D’abord un peu fade, puis de mieux en mieux. La brandade cette fois n’est
pas trop salée et son onctuosité accueille la crevette qui reste fondante.
Une sauce américaine très légère par-dessus. Encore le sud, la
Méditerranée, cette fois. Je regarde les fenêtres. Je suis bien chez
Petrossian…
Après les desserts dont une bouchée de pain d’épice savoureuse, je
comprendrai mieux la légèreté, la malice de ce menu, le chef viendra nous
voir. Une femme plus que gracieuse d’origine sénégalaise, elle s’appelle
Rougui Dia, retenez bien son nom, elle a concocté sans emphase ce menu
d’été et fait souffler le bonheur d’un vent du sud sur la maison
Petrossian. C’est ça le culot slave !
Andrea de Lauris

Restaurant Le 144 - Paris
tel: 01 44 11 32 32 - Fax: 01 44 11 32 35
144 rue de l'Université, 75007 Paris.
Ouvert du mardi au samedi, le midi de 12h15 à 14h30
et le soir de 19h30 à 22h30 (carte des caviars jusqu'à 23h). |



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Coté Boutique
Découvrez la nouvelle terrasse de
PETROSSIAN |
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Pour les beaux jours, Petrossian vient d’ouvrir une très jolie terrasse
sous les arbres de l’avenue de Latour-Maubourg.
Pour les petites faims, les déjeuners gourmands et rapides, on y sert
non
stop de 9h30 à 20h, tous les merveilleux produits de la maison.
Aperçu de la carte :
- Assiette de harengs et pommes de terre tièdes
- Belle assiette de saumon avec blinis et pommes de terre tièdes
- Assiette de tarama ou de crabe
- Grande assiette de Coupes du Tsar ®
- Petits sandwichs délicieux saumon, tarama, crabe
On peut évidemment accompagner le tout d’un verre de vin, de vodka
ou
de Yablok®
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